
Dans la présente affaire commentée, le Conseil d’Etat était ainsi amené à préciser les modalités du renoncement d’un fonctionnaire à réintégrer son emploi initial à la suite de l’annulation d’une mesure disciplinaire de déplacement d’office (CE, 1er juin 2018, req. n° 405532). En l’espèce, pouvait-on estimer qu’une demande de mutation ultérieure présentée par l’agent valait renoncement à réintégrer l’emploi initialement occupé ? Tout en rappelant les principes applicables en de telles circonstances, la haute juridiction répond par la négative à cette question.
M. B, receveur-percepteur du trésor public en tant que chef de poste à la trésorerie de Saint-Martin, et chargé des fonctions de trésorier par intérim de Saint-Barthélemy, s’était vu infliger une sanction disciplinaire de déplacement d’office par un arrêté du 20 juin 2006. En conséquence, l’intéressé a été affecté, le 8 août 2006, à la trésorerie générale des Yvelines en qualité de chargé de mission. Par un arrêt du 8 septembre 2012, la Cour administrative d’appel de Versailles avait annulée cette sanction. Toutefois elle a rejeté de faire droit à la demande d’injonction de l’intéressé visant à ce qu’il soit réintégré dans l’emploi de chef de poste à la trésorerie de Saint-Martin ou dans un emploi comptable équivalent. Après cassation, la Cour d’appel estime cette fois-ci que les demandes de mutation présentées par M. B, en 2015 et 2016, valaient renoncement à sa réintégration dans ses fonctions à Saint-Martin. L’intéressé se pourvoit donc de nouveau en cassation.
Dans un premier temps de son raisonnement, le Conseil d’Etat rappelle bien entendu la jurisprudence applicable en l’espèce selon laquelle, à la suite de l’annulation de la sanction, l’administration a l’obligation de réintégrer l’agent évincé.. " L;'annulation de la décision ayant illégalement muté un agent public oblige l'autorité compétente à replacer l'intéressé, dans l'emploi qu'il occupait précédemment et à reprendre rétroactivement les mesures nécessaires pour le placer dans une position régulière à la date de sa mutation ; qu'il ne peut être dérogé à cette obligation que dans les hypothèses où la réintégration est impossible, soit que cet emploi ait été supprimé ou substantiellement modifié, soit que l'intéressé ait renoncé aux droits qu'il tient de l'annulation prononcée par le juge ou qu'il n'ait plus la qualité d'agent public ».
Enfin, la haute juridiction coupe court à toute interprétation libérale visant à déduire un quelconque renoncement du comportement de l’intéressé. Ainsi, « un agent public illégalement évincé d'un emploi ne peut être regardé comme ayant renoncé aux droits qu'il tient de l'annulation prononcée par le juge que s'il a explicitement exprimé une volonté en ce sens ou l'a manifestée d'une manière dépourvue de toute ambiguïté ». En définitif, renonciation ne vaut que si la volonté de l’agent n’apparaît pas équivoque.