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  • Photo du rédacteurÉmilien Batôt

Projet de réforme de la commission de déontologie de la fonction publique : chute d'un bouclier

Dernière mise à jour : 21 nov. 2022


Dans sa présentation au Conseil commun de la fonction publique, le 13 février dernier, du projet de loi de transformation de la fonction publique, le secrétaire d’Etat auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics, Olivier Dussopt, a notamment annoncé la réduction de l’étendue de la saisine obligatoire de la commission de déontologie de la fonction publique (CDFP). Ainsi, seuls les agents « qui occupent des emplois dont le niveau hiérarchique ou la nature des fonctions le justifient » y seront soumis, laissant une plus grande place à un « contrôle déontologique de proximité » visant à « responsabiliser les encadrants. »

Jusqu’à présent, l’article 25 octies du Titre Ier du Statut de la fonction publique prévoyait que la CDFP était obligatoirement saisie préalablement à tout départ d’un agent public vers le secteur privé, quel que soit son niveau hiérarchique.

L’objectif affiché de cette partie de la réforme est de permettre une plus grande mobilité des agents publics vers le secteur privé, en évitant, implicitement, le blocage d’un avis d’incompatibilité rendu par la commission de déontologie quant aux agents aux fonctions de « moindre importance. »

Il s’agit là d’un changement radical de cap, compte tenu des renforcements successifs et réguliers ces dernières années, du rôle de cette commission qui a fêté l’année dernière ses 25 ans, et de l’importance grandissante d’une exemplarité de l’administration publique et du contrôle des conflits d’intérêts, et non seulement chez les cadres de la fonction publique.

Nonobstant le débat sur les choix politiques liés à ce projet et à ses impacts sur la confiance portée dans l’administration publique, cette réduction drastique des cas d'intervention de la commission constitue l’effritement d’un rempart salutaire contre les risques de prise illégale d’intérêts pour les agents publics.

En effet, l’étendue du contrôle de la CDFP (qui ne semble, lui, pas subir de modification dans le projet présenté le 13 février) sur les projets de départ des agents publics porte non seulement sur l’analyse du respect des obligations déontologiques des agents et sur l’absence d’atteinte au fonctionnement normal, à l’indépendance ou à la neutralité du service, mais également sur la préventions des risques d’atteinte à l’article 432-12 du code pénal, qui définit le délit de prise illégale d’intérêts.

Si le non-respect des premiers éléments n’a d’incidence que sur le fonctionnement de l’administration et son image, leur analyse permet d’éclairer ce dernier domaine de contrôle visant à protéger l’agent contre le risque d’être poursuivi par le juge pénal pour un tel délit.

Or, la commission d’un tel délit n’est pas réservée aux seuls hauts cadres de la fonction publique. Tout agent public en relation avec le secteur privé (on pensera notamment aux agents territoriaux des services techniques ou ceux chargés des passations des contrats de commande publique) est susceptible de se trouver dans une situation de conflits d’intérêts et, partant, de prise illégale d’intérêts répréhensible pénalement.

Pourtant, loin d’être un obstacle au départ vers le secteur privé, la CDFP a toujours rendu à cet égard des avis particulièrement pragmatiques et étayés. Ses avis d’incompatibilité sont très rares (moins de 3% depuis sa création). Elle rend le plus souvent des avis de compatibilité sous réserve (environ la moitié de ses avis), lesquelles préconisent les conditions d’exercice pour l’agent de ses futures fonctions afin ne pas risquer de porter atteinte au bon fonctionnement de l’administration, ou d’être poursuivi pénalement.

L’expérience démontre en revanche que les autorités hiérarchiques, trop peu formées et sensibilisées sur ces questions, ne prennent que rarement la mesure des risques déontologiques et de prise illégale d’intérêts encourus par leurs agents dans leurs rapports avec le secteur privé. Elles ne peuvent en réalité que difficilement – du fait de leur proximité avec l’agent et, parfois, de leurs propres intérêts dans le départ de ce dernier, ou encore en raison d’impératifs liés à la gestion de leur administration – avoir le recul nécessaire pour apprécier la réalité des risques encourus.

Si la CDFP continue à pouvoir être saisie, dans la réforme envisagée, de manière facultative, le contrôle obligatoire qu'elle avait jusqu'alors visait justement à apporter sur chaque situation un regard d'experts, impartial, et dénué de considérations autres que celles du respect des règles en vigueur et du bon fonctionnement de l’administration. Ses avis constituaient ainsi souvent un réel sauf-conduit en cas de poursuites par le juge pénal, sensible à la qualité du travail d’un organisme extérieur à l’administration employeur de l’agent.

La réduction du spectre d’intervention de la CDFP et le transfert de cette responsabilité vers les chefs de service, avant tout gestionnaires d’administration, est ainsi susceptible de conduire à la fragilisation du contrôle et, partant, à une plus grande prise de risque pénal par les agents publics souhaitant partir vers le privé.

Il aurait été, au contraire, préférable pour continuer la marche vers un fonctionnement exemplaire et efficient de l’administration publique, de conforter les moyens de la CDFP et de soutenir son rôle en continuant le travail d’information et de sensibilisation des agents publics aux règles déontologiques via, notamment, les nouveaux référents-déontologues.

Cette seule partie émergée du grand iceberg que représente le projet de réforme de la fonction publique souhaitée par le gouvernement, déjà sujette à de nombreuses critiques de la part des experts du secteur et des organisations syndicales, doit appeler à une plus grande réflexion sur les enjeux de mesures qui pourraient s'avérer particulièrement dangereuses pour l'avenir.

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