Si la jurisprudence admettait de manière constante qu’un fonctionnaire peut être mis, rétroactivement, en disponibilité d’office pour raison de santé à l’expiration de ses droits à congés de maladie ordinaire (CE, 5 janvier 1977, req. nos 97373 et 99498), quid du reversement du demi-traitement versé au fonctionnaire lorsque le comité médical s’est ainsi prononcé en sens ?
En effet, dans les trois versants de la fonction publique, il est précisé à l’identique que, « lorsque le fonctionnaire a obtenu pendant une période de douze mois consécutifs de congés de maladie d’une durée totale de douze mois, il ne peut, à l’expiration de sa dernière période de congé, reprendre son service sans l’avis favorable du comité médical. En cas d’avis défavorable, il est soit mis en disponibilité, soit reclassé dans un autre emploi, soit, s’il est reconnu définitivement inapte à l’exercice de tout emploi, admis à la retraite après avis de la commission de réforme. Le paiement du demi-traitement est maintenu, le cas échéant, jusqu’à la date de décision de reprise, de reclassement, de mise en disponibilité ou d’admission à la retraite » (pour la FPE : article 27 du décret n° 86-442 du 14 mars 1986 : pour la FPT : article 17 du décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 ; pour la FPH : article 17 du décret n° 88-386 du 19 avril 1998).
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Or, il existe ici une différence quant à la nature du traitement selon que l’agent se trouve placé à demi-traitement résultant de l’attente de la décision de l’administration ou mis en disponibilité pour raison de santé. En effet, cette dernière position statutaire n’implique in fine que le maintien des indemnités journalières prévues à l’article L. 323-1 du Code de la sécurité sociale. Parmi ces différences, sous réserve de l’exception prévue à l’article L. 323-4 de ce même pour les agents ayant au moins trois enfants à charge, le traitement se voit généralement diminué, ainsi qu’exempté de toutes cotisations à pension de retraite. Aussi, il n’était pas rare que les fonctionnaires placés rétroactivement en disponibilité, aient, en plus du poids leur état de santé, la surprise de recevoir un avis de somme à payer par leurs employeurs publics.
Dans un arrêt récent, le Conseil d’Etat tranche définitivement cette difficulté (CE, 9 novembre 2018, Commune du Perreux-sur-Marne, req. n° 412684), et ce en dissociant la position statutaire rétroactivement régulièrement prise et la rémunération maintenue dans l’attente de la décision. Ainsi, la décision de placement en demi-traitement est créatrice de droit, et n’a pas de caractère provisoire. Il en juge en ces termes que, « la circonstance que la décision prononçant la reprise d'activité, le reclassement, la mise en disponibilité ou l'admission à la retraite rétroagisse à la date de fin des congés de maladie n'a pas pour effet de retirer le caractère créateur de droits du maintien du demi-traitement, prévu par les dispositions citées au point 4 ; que, par suite, en jugeant que le demi-traitement versé au titre de ces dispositions ne présentait pas un caractère provisoire et restait acquis à l'agent alors même que celui-ci avait, par la suite, été placé rétroactivement dans une position statutaire n'ouvrant pas par elle-même droit au versement d'un demi-traitement, la cour administrative d'appel de Paris a fait une exacte application de ces dispositions ». Ainsi, l’agent ayant perçu un demi-traitement dans l’attente d’une décision, dont il s’avère qu’il aurait dû être placé, sur cette période en disponibilité pour raison de santé, n’aura pas à rendre les sommes qu’il a perçu
En définitive, cette jurisprudence risque de bouleverser quelque peu les usages des employeurs publics et de leurs trésoriers, mais également complexifier le décompte des trimestres pour les fonds de pension. En sus, l’on peut se poser la question de savoir si cette solution ne s’appliquerait pas aussi aux agents placés à demi-traitement à l’expiration des congés de longue maladie (CLM) ou de longue durée (CLD) dans l’attente de l’avis du comité médical ou de la commission de réforme.