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La mise en œuvre d’une condamnation pénale exécutoire

Dernière mise à jour : 21 nov. 2022

Par une décision du 10 décembre 2020 (CE, 10 décembre 2020, req. n° 437034), le Conseil d’État a rappelé qu’un employeur public doit tirer les conséquences d’une condamnation pénale exécutoire. Il a en outre, au terme d’un raisonnement quelque peu sibyllin, jugé qu’une administration pouvait régulièrement décider de radier définitivement des effectifs un agent, alors même que celui-ci faisait l’objet d’une simple interdiction temporaire d’exercice d’un emploi public.


En l’espèce, par un jugement rendu le 10 mai 2016, le tribunal correctionnel d’Épinal a reconnu coupable, des délits de détournement des fonds publics par une personne chargée d’une mission de service public et de prise illégale d’intérêt, le secrétaire général de la chambre des métiers et de l’artisanat des Vosges. Ce dernier a donc été condamné à une peine d’emprisonnement de six mois avec sursis, au paiement d’une amende de 20.000 euros, ainsi qu’à une peine complémentaire d’interdiction d’exercice de l’activité professionnelle ayant permis la commission de l’infraction d’une durée d’un an.


Prenant acte du fait que ce jugement était assorti de l’exécution provisoire, le Président de la chambre des métiers et de l’artisanat des Vosges, par un arrêté du 21 septembre 2016, a décidé de mettre fin aux fonctions de son secrétaire général et l’a radié des effectifs. Lorsque l’intéressé a sollicité sa réintégration à l’issue de la période d’interdiction d’exercice, l’administration a refusé de faire droit à sa demande par une décision du 9 mai 2017. Il a, par conséquent, saisi le tribunal administratif d’Épinal afin de faire annuler les décisions des 21 septembre 2016 et 9 mai 2017. Sa requête a toutefois été rejetée.


Saisie de l’appel, la cour administrative d’appel de Nancy (CAA Nancy, 24 octobre 2019, req. n° 18NC01208), a quant à elle fait droit aux demandes du requérant aux motifs suivants :


  • Il appartenait bien à la chambre des métiers et de l’artisanat des Vosges de tirer les conséquences de la peine complémentaire d’interdiction d’exercice dès lors qu’elle était assortie de l'exécution provisoire ;


  • En revanche, la condamnation n’impliquait pas, par elle-même, une rupture définitive et automatique de tout lien de l’intéressé avec le service, notamment tant qu’elle n’avait pas acquis de caractère définitif ;


  • En outre, que le requérant pouvait faire l’objet d'une simple suspension provisoire, assortie, le cas échéant, de l'engagement d'une procédure disciplinaire à raison des faits ayant donné lieu à la condamnation.



Saisi d’un pourvoi en cassation, par la chambre des métiers et de l'artisanat des Vosges, le Conseil d’État a cependant infléchi cette analyse.


D’abord, s’agissant de l’application du jugement pénal, il a rappelé que « l'autorité administrative est tenue de tirer les conséquences que doit emporter la condamnation pénale exécutoire d'un agent à une peine d'interdiction d'exercer un emploi public, même en l'absence de disposition de son statut prévoyant cette hypothèse ».


Le Conseil État a ainsi confirmé – comme l’avait souligné le rapporteur public dans ses conclusions – qu’une décision assortie d’une exécution provisoire constitue une décision à caractère définitif et que l'administration n’a d’autre choix que d’appliquer sur le champ la peine complémentaire (CE 20 juin 2012, Simonpieri, req. n° 356865).


Ensuite, concernant la radiation des effectifs, le Conseil État a retenu un raisonnement différent de celui de la cour, estimant que le requérant, « compte tenu de sa condamnation pour détournement de fonds publics par une personne chargée d'une mission de service public et prise illégale d'intérêt et de la nature de l'emploi de secrétaire général de l'établissement public qu'il occupait, ne pouvait bénéficier d'une mesure de reclassement sur un autre emploi au sein de la chambre quand bien même il aurait été suspendu en vue de l'exercice de poursuites disciplinaires, la cour a commis une erreur de droit. Il suit de là que la chambre des métiers et de l'artisanat des Vosges est fondée sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque ».


Ce second raisonnement est surprenant à plus d’un titre.


D’une part, il va directement à l’encontre des préconisations du rapporteur public, lequel avait estimé que si l’administration était en compétence liée pour mettre en œuvre le jugement pénal, cette obligation n’allait pas au-delà de ce que cette décision impliquait elle-même.


La radiation pure et simple du requérant apparaissait d’autant moins nécessaire que l’administration disposait d’une autre option, lui permettant de placer l’agent dans une situation régulière, à savoir la simple suspension pour motif disciplinaire.


D’autre part, le Conseil d’État semble pourtant avoir estimé que l’administration a tiré les seules conséquences possibles de la condamnation pénale en radiant des cadres l’agent, au motif que son reclassement sur un autre poste aurait été impossible.


L’utilisation de cette notion de « reclassement » – qui n’a été abordée ni par la cour dans son arrêt, ni par le rapporteur public dans ses conclusions – interroge d’autant plus que ni la mesures de suspension envisagée, ni la procédure disciplinaire préconisée ne nécessitent obligatoirement le recours à une telle mesure – dont l’impossibilité n’est d’ailleurs pas démontrée.


Le Conseil d’État valide, en tout état de cause, la position radicale adoptée par l’administration afin d’écarter définitivement de ses effectifs un agent condamné pénalement.


Nul doute que l’application de cette décision par la cour administrative d’appel de Nancy, devant laquelle l’affaire a été renvoyée, sera donc scrutée avec intérêt !



Julia Estrade

Avocate collaboratrice

Officio avocats

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