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  • Photo du rédacteurÉmilien Batôt

L'exclusion temporaire de fonctions de l'agent en congé de maladie : la fin de la règle du report

Dernière mise à jour : 14 août 2023

Par un arrêt du 3 juillet 2023 (M. A. c/ Ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse, req. n° 459472), le Conseil d'État a mis fin à une règle jurisprudentielle incertaine qui visait à imposer le report des effets d'une exclusion temporaire de fonctions d'un agent en congé maladie : dorénavant, le fait que l'agent soit en congé maladie n'empêche plus l'entrée en vigueur immédiate de la sanction, y compris s'agissant de ses conséquences financières (absence de rémunération).

Congés de maladie et discipline : deux procédures distinctes


Depuis longtemps, le Conseil d'État rappelle que le fait qu'un agent soit en congé maladie n'empêche pas l'engagement d'une procédure disciplinaire à son encontre, ni, en principe, qu'une sanction soit prise contre l'agent (CE, 11 mars 1992, Mme L. c/ CHR de Bordeaux, req. n° 88306).


Il n'existe en effet, et assez logiquement, aucune difficulté à ce qu'un agent placé en congé de maladie soit l'objet d'une sanction telle qu'un avertissement, un blâme, un abaissement d'échelon ou encore une rétrogradation.


Plus délicate pouvait apparaître le prononcé d'une sanction visant à exclure l'agent du service, telle une exclusion temporaire de fonctions ou une révocation, dès lors, qu'au-delà de la simple modification de la situation administrative "de carrière" de l'agent, l'exclusion du service entraîne une privation de rémunération, voire de droits, qui pouvait sembler entrer en conflit avec les droits ouverts à l'agent malade.


S'agissant de la révocation, la jurisprudence est depuis longtemps claire : le Conseil d'État affirmait dès 1992, et confirmait encore en 2016, que le fait que l'agent soit placé en congé de maladie n'empêche pas l'entrée en vigueur immédiate d'une mesure de révocation (CE, 11 mars 1992, Mme L. c/ CHR de Bordeaux, req. n° 88306, précité ; CE, 6 juillet 2016, Mme A. c/ Garde des sceaux, ministre de la justice, req. n° 392728). L'agent n'a alors pas droit au maintien de sa rémunération, ses droits à congés maladie lui étant retirés du fait de la mesure de radiation des cadres que sous-tend la révocation (CE, 30 juillet 1997, M. X. c/ Commune de Saint-Bonnet-de-Mure, req. n° 132480).


Ce constat reste toutefois une possibilité et non une règle : l'administration peut tout à fait légalement décider de prévoir qu'une mesure de révocation prendra effet uniquement à l'expiration du congé de maladie en cours de l'agent sanctionné - en raison de l'indépendance des procédures disciplinaires et de placement en congé de maladie (CE, 13 mai 1992, M. Y. c/ Ministre de la défense, req. n° 106098).


Maladie et exclusion temporaire de fonctions : une approche juridique jusqu'alors tumultueuse


Mais la position de la jurisprudence était jusqu'alors différente, quoi qu'incertaine, s'agissant de l'exclusion temporaire de fonctions.


Différente, car par deux arrêts, rendus en 2016 et 2020 (sur la même affaire), régulièrement cités en référence et appliqués à ce titre, la cour administrative d'appel de Marseille avait estimé que du fait des droits à congé maladie de l'agent et des droits à rémunération s'y attachant, l'administration prenant une exclusion temporaire de fonctions devait nécessairement différer la prise d'effet de la sanction à l'expiration des droits à congé maladie (CAA Marseille, 24 juin 2016, Commune de Saint-Bauzille-de-Putois, req. n° 15MA02818 ; CAA Marseille, 15 octobre 2020, Commune de Saint-Bauzille-de-Putois, req. n° 19MA04416).


Incertaine, car la cour administrative d'appel de Marseille, dans son arrêt de 2016, avait posé un principe général, au-delà de la seule sanction d'exclusion temporaire de fonctions, venant contredire les décisions jusqu'alors prises par le Conseil d'État sur la révocation. Elle y indiquait en effet que « le placement d'un fonctionnaire en congé de maladie le fait bénéficier du régime de rémunération attaché à cette situation et fait donc obstacle à ce qu'il exécute pendant son congé de maladie une sanction disciplinaire prononcée à son encontre  ».


Ce positionnement principiel laissait ainsi à entendre que le congé maladie et ses droits à rémunération empêchaient l'exécution de toute forme de sanction s'accompagnant d'un retrait de rémunération (et donc, potentiellement également, d'une révocation, au contraire de ce qu'avait déjà pu acter le Conseil d'État jusqu'alors).


Le Conseil d'État pourtant, saisi d'un pourvoi contre l'arrêt de 2016, l'avait cassé et renvoyé à la cour, mais sur un motif tout autre, laissant planer un doute sur le principe général alors dégagé par les juges marseillais (CE, 26 septembre 2019, Commune de Saint-Bauzille-de-Putois, req. n° 402496).


Il n'existait pas ainsi de position tranchée de la juridiction administrative suprême sur le sujet.


C'est chose faite depuis l'arrêt du Conseil d'État du 3 juillet 2023.


Une nouvelle position de principe : le congé maladie n'empêche l'exécution immédiate d'aucune sanction disciplinaire


Par son arrêt du 3 juillet 2023, le Conseil d'État clarifie l'errance jurisprudentielle permise par les arrêts de la cour administrative d'appel de Marseille par la prise d'une position de principe.


D'une part, les juges du Palais Royal indiquent de manière dorénavant générale, tout sanction confondue, que : « la procédure disciplinaire et la procédure de mise en congé de maladie sont des procédures distinctes et indépendantes, et la circonstance qu'un agent soit placé en congé de maladie ne fait pas obstacle à l'exercice de l'action disciplinaire à son égard ni, le cas échéant, à l'entrée en vigueur d'une décision de sanction.»


Les décisions de sanction disciplinaire peuvent donc dorénavant, quelles qu'elles soient, entrer en vigueur (c'est-à-dire prendre leurs effets) malgré le fait que l'agent objet de la sanction soit placé en congé maladie : il n'est plus question d'obliger le report d'entrée en vigueur d'une sanction disciplinaire (dont les exclusions temporaires de fonction) du fait d'un congé maladie.


Et le Conseil d'État en précise immédiatement, de manière très didactique, les conséquences s'agissant particulièrement de l'exclusion temporaire de fonctions.


La Haute Assemblée rappelle en effet que les règles « selon lesquelles le fonctionnaire conserve, selon la durée du congé [maladie], l'intégralité ou la moitié de son traitement, ont pour seul objet de compenser la perte de rémunération due à la maladie en apportant une dérogation au principe [...] subordonnant le droit au traitement au service fait. Elles ne peuvent avoir pour effet d'accorder à un fonctionnaire bénéficiant d'un congé de maladie des droits à rémunération supérieurs à ceux qu'il aurait eus s'il n'en avait pas bénéficié. »


Or, l'agent objet d'une exclusion temporaire de fonctions étant par essence privé de rémunération durant l'exclusion, « il ne saurait, pendant cette période, bénéficier d'un maintien de sa rémunération à raison de son placement en congé de maladie. »


Aussi, le congé maladie ne permet plus à l'agent public d'échapper à la mise en œuvre d'une sanction disciplinaire d'exclusion temporaire de fonctions, que ce soit s'agissant de la date d'entrée en vigueur de la sanction, que des conséquences financières de cette dernière.


Cette position salutaire vient mettre fin à une insécurité, tant pour les agents que pour les administrations, dans l'application de ces sanctions dans le temps, et poser de manière générale une distinction franche entre les questions de congé maladie et les sanctions disciplinaires.


Il convient toutefois immédiatement de rappeler que ce principe ne s'étend pas aux mesures de suspension conservatoire des articles L. 531-1 et suivants du code général de la fonction publique (anciennement article 30 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983) : ces mesures, parties intégrantes des procédures disciplinaires, ne constituent pas pour autant des sanctions disciplinaires à proprement parler, sanctions qui sont les seules visées par la décision du Conseil d'État.


Le raisonnement de la décision du 3 juillet 2023 est en effet centré tant sur la notion de sanction que sur les conséquences de cette dernière sur l'agent en termes de rémunération, le Conseil d’État y opposant le droit dérogatoire au maintien de rémunération prévu pour les congés maladie et l'absence de rémunération liée à l'exclusion disciplinaire. Mais les mesures de suspension conservatoire s'accompagnent, elles, d'un maintien de rémunération (art. L. 531-1 CGFP).


Dès lors qu'elles ont par ailleurs pour objet d'écarter temporairement un agent du service, et que l'agent en congé maladie est, par essence, absent du service, il nous semble que la jurisprudence qui prévoit qu'il est mis fin, en cas de congé maladie, à une mesure de suspension conservatoire (CE, 26 juillet 2011, M. T. c/ Ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales, req. n° 343837), va continuer d'exister indépendamment de ce nouveau principe relatif aux sanctions disciplinaires à part entière.


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