Par une décision CE 13 décembre 2017, Centre communal d'action sociale d'Aimargues, req. n°393466, le Conseil d'État a eu l'occasion de préciser l'application de sa jurisprudence Ternon aux décisions non formalisées mais créatrices de droits accordant un avantage financier.
Par délibération du 9 août 1995, le centre communal d'action sociale (CCAS) d'Aimargues (Gard) a décidé l'attribution au vice-président du centre d'une indemnité de fonction annuelle.
Le 1er janvier 2002, Mme A...a été désignée vice-présidente du CCAS, fonctions qu'elle a exercées jusqu'au 21 mai 2008. Elle a perçu l'indemnité de fonction annuelle tout au long de cette période.
Estimant toutefois qu'il n'était pas légalement habilité à verser une telle indemnité, le conseil d'administration du CCAS d'Aimargues a, par une délibération du 30 janvier 2012, demandé au conseil municipal d'Aimargues d'ordonner le remboursement par Mme A...des indemnités de fonction qu'elle avait perçues. A la suite d'une délibération du conseil communal d'Aimargues, le président du CCAS d'Aimargues a, le 11 avril 2012, émis le titre de perception correspondant.
Par deux jugements du 7 novembre 2013, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté les demandes d'annulation introduites par Mme A...contre la délibération du conseil d'administration du CCAS d'Aimargues du 30 janvier 2012 et contre le titre exécutoire du 11 avril 2012.
Par un arrêt du 10 juillet 2015, la cour administrative d'appel de Marseille a annulé les jugements du tribunal administratif ainsi que la délibération du CCAS d'Aimargues du 30 janvier 2012 et le titre exécutoire du 11 avril 2012, estimant que l'illégalité de la délibération de 1995 n'autorisait pas le CCAS à rapporter les décisions individuelles prises sur le fondement de ce règlement illégal après l'expiration du délai de quatre mois, ni à rapporter ledit règlement (CAA Marseille, 10 juillet 2015, req. n° 13MA04934-13MA04935).
S’appuyant sur sa jurisprudence constante, le Conseil d’État a rappelé que l'administration ne peut retirer une décision individuelle créatrice de droits, si elle est illégale, que dans le délai de quatre mois suivant la prise de cette décision (CE, Assemblée, 26 octobre 2001, Ternon , req. n° 197018, Lebon p. 497).
Plus précisément, une décision administrative explicite accordant un avantage financier crée des droits au profit de son bénéficiaire, alors même que l'administration avait l'obligation de refuser cet avantage. Il en va de même, dès lors que le bénéfice de l'avantage en cause ne résulte pas d'une simple erreur de liquidation ou de paiement, de la décision de l'administration accordant un avantage financier qui, sans avoir été formalisée, est révélée par les circonstances de l'espèce, eu égard notamment à la situation du bénéficiaire et au comportement de l'administration.
En l’espèce, la délibération du CCAS a accordé une indemnité de fonction à la vice-présidente, de sorte que cette dernière était en droit d'en bénéficier quand elle a été désignée à ce poste sans qu'aucune autre décision formelle lui octroyant cette indemnité ne soit nécessaire. L'indemnité de fonction a été versée chaque mois à l'intéressé au cours des années où elle a occupé ce poste de vice-présidente. Dans ces circonstances, le versement de cette indemnité ne saurait résulter d'une simple erreur de liquidation ou de paiement de la part de l'administration. Par suite, la décision d'attribution de l'indemnité figurant dans la délibération a créé des droits pour l'intéressé dès la date de sa désignation, alors même qu'elle était illégale depuis l'origine.