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150 éléments trouvés pour «  »

  • Procédure pénale et absence de service fait : le contrôle judiciaire peut suffire à suspendre la rémunération d’un agent

    Par un arrêt du 27 février 2024 (CAA Paris, 27 février 2024, M. B. c/ Ministre de l’intérieur et des outre-mer, req. n° 23PA01342), la cour administrative d’appel de Paris est venu rappeler quelques conséquences, pour un agent public et son administration d’emploi, de mesures d’ordre pénales prononcées à son encontre, même provisoires : lorsqu’un agent est interdit d’exercer ses fonctions par mesure de contrôle judiciaire, l’administration est tenue d’en tirer les conséquences, notamment sur sa rémunération, en l’absence de service fait, et ce même sans procédure disciplinaire. Monsieur B., gardien de la paix à Paris, a été mis en examen pour des faits de trafic d'influence passif et corruption passive. Le juge d’instruction en charge de l’affaire l’a alors placé sous contrôle judiciaire le temps de l’instruction de l’affaire, avec interdiction d’exercer toute activité de fonctionnaire de police et toute activité au sein de la fonction publique d’État ou de la fonction publique territoriale. Monsieur B. a fait appel d’une demande de mainlevée de cette ordonnance, et si la cour d’appel de Paris a supprimé l’interdiction d’exercer toute activité au sein de la fonction publique d’État ou territoriale, elle a maintenu l’interdiction d’exercer toute activité de fonctionnaire de police. En conséquence de ces mesures, Monsieur B. a été privé de rémunération à compter de l’édiction du contrôle judiciaire, jusqu’à son placement en suspension conservatoire avec rémunération, près d’un an plus tard. A l’issue de la procédure pénale, l’agent n’a toutefois pas été condamné en justice pour les faits qui avaient donné lieu aux mesures de contrôle judiciaire. Monsieur B. a alors recherché la responsabilité de son administration pour les préjudices qu’il estimait avoir subis du fait des mesures prises (ou non prises) à son sujet par son administration durant la période du contrôle judiciaire. Le tribunal administratif de Paris ayant rejeté sa demande, il a interjeté appel devant la cour administrative d’appel du ressort. Les juges d’appel parisiens ont ainsi dû se pencher sur la question de savoir quelles étaient les conséquences, pour l’employeur public, d’une mesure de contrôle judiciaire provisoire portant interdiction d’exercer les fonctions d’un de ses agents. Le système protecteur de la suspension conservatoire en cas de poursuites pénales C’est l’ancien article 30 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, aujourd’hui codifié aux L. 531-1 et suivant du code général de la fonction publique, qui prévoyait le régime de la suspension conservatoire en cas de faute grave. Il prévoyait notamment que : « Le fonctionnaire, auteur d'une faute grave, qu'il s'agisse d'un manquement à ses obligations professionnelles ou d'une infraction de droit commun, peut être suspendu par l'autorité ayant pouvoir disciplinaire qui saisit, sans délai, le conseil de discipline.Le fonctionnaire suspendu conserve son traitement, l'indemnité de résidence, le supplément familial de traitement. Sa situation doit être définitivement réglée dans le délai de quatre mois. » Ainsi, ce ne sont pas seulement les fautes disciplinaires (professionnelles) qui permettent la mise en œuvre d’une suspension conservatoire – laquelle n’est pas privative de rémunération – mais également les infractions de droit commun. Si ce texte est resté cantonné à ces quelques acceptions pendant des années, il a été profondément modifié (complété) par la loi n° 2016-483 du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires, qui est venue ajouter nombre de conditions et situations liées à l’existence de poursuites pénales. Il est dorénavant prévu que : « En cas de poursuites pénales, si, à l'expiration d'un délai de quatre mois, aucune décision n'a été prise par l'autorité ayant le pouvoir disciplinaire et si les mesures décidées par l'autorité judiciaire ou l'intérêt du service n'y font pas obstacle, le fonctionnaire est rétabli dans ses fonctions. […] Lorsque, sur décision motivée, il n'est pas rétabli dans ses fonctions, il peut être affecté provisoirement par l'autorité investie du pouvoir de nomination, sous réserve de l'intérêt du service, dans un emploi compatible avec les obligations du contrôle judiciaire auquel il est, le cas échéant, soumis. A défaut, il peut être détaché d'office, à titre provisoire, dans un autre corps ou cadre d'emplois pour occuper un emploi compatible avec de telles obligations. L'affectation provisoire ou le détachement provisoire prend fin lorsque la situation du fonctionnaire est définitivement réglée par l'administration ou lorsque l'évolution des poursuites pénales rend impossible sa prolongation. » L’article (et dorénavant le code) prévoient enfin des mesures spécifiques liées à la rémunération de l’agent subissant des poursuites pénales : « Le fonctionnaire qui, en raison de poursuites pénales, n'est pas rétabli dans ses fonctions, affecté provisoirement ou détaché provisoirement dans un autre emploi peut subir une retenue, qui ne peut être supérieure à la moitié de la rémunération mentionnée au deuxième alinéa. Il continue, néanmoins, à percevoir la totalité des suppléments pour charges de famille. » Mais ces mesures de protection n’ont lieu qu’en cas de prononcé, par l’administration, d’une suspension conservatoire. L’absence de caractère obligatoire de la suspension conservatoire, et les conséquences du contrôle judiciaire sur la rémunération La cour administrative d’appel de Paris le rappelle dans l’arrêt commenté : l’administration – qui détermine seule l’opportunité de poursuites disciplinaires – n’a aucune obligation de suspendre à titre conservatoire un agent faisant l’objet de poursuites judiciaires : « L'engagement d'une procédure disciplinaire ne s'imposait pas pour tirer les conséquences de l'interdiction judiciaire à laquelle il était soumis et l'administration n'était aucunement tenue de prendre à son encontre une mesure de suspension de ses fonctions. » L’administration a en revanche obligation de tirer les conséquences de mesures pénales : elle a interdiction de confier des fonctions à un agent qui s’est vu interdire, par l’autorité judiciaire, l’exercice de fonctions publiques. Dès lors, les juges administratifs d’appel parisiens ont estimé que l’ensemble des dispositions précitées n’empêchent pas l’administration « d’interrompre, indépendamment de toute action disciplinaire, le versement du traitement d'un fonctionnaire pour absence de service fait, notamment en raison de l'interdiction d'exercer ses fonctions résultant d'une mesure de contrôle judiciaire. » L’agent ne pouvant plus exercer ses fonctions du fait de la mesure de contrôle judiciaire prononcée à son encontre, il se plaçait en absence de service fait, entraînant automatiquement l’arrêt du versement de sa rémunération. Une automaticité sous conditions Il convient néanmoins de rappeler – comme l’a fait implicitement la cour administrative d’appel de Paris – que l’automaticité des conséquences tirées par l’administration d’une mesure de contrôle judiciaire est soumise à conditions. Certes, et d’une part, l’absence de caractère définitif d’une mesure de contrôle judiciaire, par essence provisoire, n’est pas de nature à empêcher son constat. Encore faut-il que cette mesure soit exécutoire immédiatement et qu’elle ne fasse pas l’objet d’un appel suspensif. L’administration ne peut ainsi tenir compte de mesures judiciaires qui seraient suspendues par l’effet des textes propres à la procédure pénale. D’autre part, toute mesure de contrôle judiciaire ne peut entraîner une telle privation de rémunération. Dans le cas présent, la mesure de contrôle judiciaire – pleinement exécutoire – consistait notamment – dans sa version issue de l’appel formé par Monsieur B. – en une « interdiction d'exercer toute activité de fonctionnaire de police ». Or, les fonctions du grade des gardiens de la paix étant nécessairement liées à des activités de fonctionnaire de police, la cour a constaté que le ministre n’avait pas la possibilité d’affecter Monsieur B. à d’autres fonctions de son grade, même temporairement. Les juges administratifs d’appels parisiens relèvent néanmoins que Monsieur B. aurait pu demander à être détaché dans un emploi compatible avec l’interdiction judiciaire prononcée à son encontre, ce qu’il n’avait pas fait, empêchant de rechercher la responsabilité du ministère à ce titre. Il n’en reste pas moins que par cette décision, la cour administrative d’appel de Paris a mis a mal le système – quelque peu complexe au demeurant – entourant la suspension conservatoire en cas de poursuites pénales de l’agent public, mis en place par la loi « déontologie » d’avril 2016 , et qui visait notamment à prévoir spécifiquement les droits d’un agent public sujet à une mesure de contrôle judiciaire l’empêchant d’exercer ses fonctions. Si la logique de la cour est implacable juridiquement, elle interroge sur la pertinence de ce système de garanties et les choix opérés (et d’ailleurs questionnés par les praticiens du droit de la fonction publique en 2016) par le législateur lors de la modification des règles relatives à la suspension conservatoire. Les juges administratifs d’appels parisiens auraient ainsi pu pallier ce qui semble être un oubli du législateur de 2016 et étendre les garanties accordées à l’agent suspendu sous contrôle judiciaire à tous les agents placés sous contrôle judiciaire, suspension ou non.

  • Récentes avancées dans la reconnaissance de la qualité de « travailleur » au sens du droit européen pour les sapeurs-pompiers volontaires

    Par une décision du 14 février 2024 (Union Syndicale Solidaires SDIS c. France, Réclamation n° 176/2019 et Union Syndicale Solidaires SDIS c. France, Réclamation n° 193/2020), le Comité européen des droits sociaux a conclu à la violation, par la France, de la Charte sociale européenne en raison de l’absence de reconnaissance de la qualité de « travailleur » pour les sapeurs-pompiers volontaires français. L’organisation des sapeurs-pompiers en France repose sur une dichotomie, entre les sapeurs-pompiers professionnels, agents de la fonction publique territoriale, et les sapeurs-pompiers volontaires, exerçant pour la plupart leurs missions en plus d’une autre activité professionnelle. Les sapeurs-pompiers professionnels entrent dans la fonction publique territoriale par la voie du concours, alors que les sapeurs-pompiers volontaires peuvent librement consentir à exercer cette activité, dès lors qu’ils répondent à plusieurs conditions fixées par le décret n° 2017-1610 du 27 novembre 2017 relatif aux sapeurs-pompiers volontaires. De manière paradoxale, le système de secours d’urgence français repose considérablement sur les sapeurs-pompiers volontaires : l’on compte à ce jour sur le territoire environ 197 800 sapeurs-pompiers volontaires, représentant environ 78% des sapeurs-pompiers de France. Pourtant, en raison de leur statut de « non-professionnel », les sapeurs-pompiers volontaires se sont vu attribuer une protection juridique moindre et peu attrayante, et ce notamment concernant l’encadrement de leurs heures de travail. L’article 6 de la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail prévoit une durée de travail maximale hebdomadaire pour les travailleurs : « Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que, en fonction des impératifs de protection de la sécurité et de la santé des travailleurs a) la durée hebdomadaire du travail soit limitée au moyen de dispositions législatives, réglementaires ou administratives ou de conventions collectives ou d'accords conclus entre partenaires sociaux ; b) la durée moyenne de travail pour chaque période de sept jours n'excède pas quarante-huit heures, y compris les heures supplémentaires. » Toutefois, pendant longtemps, le droit et les juridictions internes ont refusé d’attribuer la qualité de « travailleur » aux sapeurs-pompiers volontaires, empêchant ainsi de les protéger en limitant leur temps de travail. Ce manque d’encadrement des heures effectuées par les sapeurs-pompiers volontaires entraine en effet des mises en situation dangereuses pour les volontaires épuisés, mais inévitablement aussi pour les victimes prises en charge. Ce n’est que récemment que les juridictions administratives ont commencés à considérer que les sapeurs-pompiers volontaires répondaient à l’intégralité des critères permettant de qualifier un travailleur au sens du droit européen, à savoir : L’exercice d’une activité réelle et effective, L’attribution d’une rémunération pour service fait, L’existence d’un lien de subordination. En effet, le sapeur-pompier volontaire exerce dans les exactes mêmes conditions qu’un sapeur-pompiers professionnel (article L. 723-6 du code de sécurité intérieure), sous la responsabilité du SDIS de rattachement et de son supérieur hiérarchique (R. 723-35 du code de sécurité intérieure) et à le droit à des indemnités en fonction des gardes et des astreintes effectivement réalisées (article 11 de la loi n° 96-370 du 3 mai 1996). La qualité de travailleur a été une première fois expressément reconnue dans un jugement rendu par le tribunal administratif de Strasbourg, qui a considéré que les sapeurs-pompiers volontaires devaient être considérés comme des travailleurs au sens de la directive du 04 novembre 2003 dès lors notamment qu’ils recevaient une indemnité pour le service fait, constituant une forme de rémunération, et qu’ils étaient placés dans une relation de subordination à l’égard d’un SDIS (TA Strasbourg, 02 novembre 2017, req. n°1700145). Plus récemment, la même juridiction a confirmé que : « 7. (…) les sapeurs-pompiers volontaires, qui perçoivent notamment des indemnités horaires en vertu de l’article L. 723-9 du code de la sécurité intérieure, se trouvent pendant leurs gardes dans une relation de subordination à l’égard de la hiérarchie de leur SDIS en vertu de l’article R. 723-35 du même code. Ainsi, ils constituent des travailleurs au sens de la Directive du 4 novembre 2013, dont le délai de transposition est expiré, et relèvent, par voie de conséquence, de son champ d’application. Par suite, en l’absence de dispositions législatives ou réglementaires nationales, il appartenait au SDIS de la Moselle de déterminer le nombre d’heures maximales d’heures de gardes hebdomadaires pouvant être effectuées par les sapeurs-pompiers volontaires exerçant en son sein, dans les conditions et limites posées par cette directive, lesquelles doivent être respectées quels que soient le nombre d’employeurs. Il suit de là, sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de la requête, que le syndicat CFDT Interco Moselle est fondé à demander l’annulation des décisions litigieuses. » (TA Strasbourg, 24 mai 2023, req. n° 2101694). Si une incertitude persistait, ces jugements n’ayant été rendus que par des juridictions de première instance, le 14 février 2024, le Comité européen des droits sociaux est cependant venu confirmer la position du tribunal administratif de Strasbourg. L’Union Syndicale Solidaires SDIS (« SUD SDIS ») a saisi le Comité européen des droits sociaux de deux réclamations, en soutenant que l’absence de reconnaissance de la qualité de travailleur aux sapeurs-pompiers volontaires entrainaient une impossibilité pour eux de jouir notamment de leurs droits relatifs à des conditions de travail équitables, à des conditions de travail sûres et saines et à la protection de la santé. Dans sa décision, le Comité européen des droits sociaux décision a notamment conclu, à l’unanimité, à la violation par la France, des articles 1§2 (droit du travail : « En vue d'assurer l'exercice effectif du droit au travail, les Parties s'engagent, (…) 2 à protéger de façon efficace le droit pour le travailleur de gagner sa vie par un travail librement entrepris »), et 2§1 (droit à des conditions de travail équitables : « En vue d'assurer l'exercice effectif du droit à des conditions de travail équitables, les Parties s'engagent: 1 à fixer une durée raisonnable au travail journalier et hebdomadaire, la semaine de travail devant être progressivement réduite pour autant que l'augmentation de la productivité et les autres facteurs entrant en jeu le permettent ») de la Charte sociale européenne, en raison de l’absence de reconnaissance de la qualité de travailleurs pour les sapeurs-pompiers volontaires en droit français : « 112 (…) Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a considéré que les travailleurs non rémunérés, y compris les travailleurs bénévoles, avaient le droit de jouir de conditions de travail justes et favorables et devaient être protégés par les lois et les politiques relatives à la sécurité et à la santé au travail, au repos et aux loisirs, à la limitation raisonnable de la durée du travail, ainsi qu’à la sécurité sociale (voir paragraphe 55 ci-dessus). De plus, les Directives de l'OIT sur le travail décent dans les services publics d'urgence insistent sur le fait que les bénévoles intervenant dans les services publics d'urgence « sont des travailleurs, de sorte que les principes et droits fondamentaux au travail devraient leur être appliqués dans toute la mesure possible » (Union Syndicale Solidaires SDIS c. France, Réclamation n° 176/2019 et Union Syndicale Solidaires SDIS c. France, Réclamation n° 193/2020) Par cette décision, le Comité européen des droits sociaux confirme que les sapeurs-pompiers volontaires français doivent bien être regardés comme des travailleurs au sens du droit européen, et qu’il est ainsi nécessaire de leur faire bénéficier des droits afférents à ce statut, notamment sur l’encadrement du temps de travail. Toutefois, le jugement rendu par le tribunal administratif de Strasbourg le 24 mai 2023 précité et concluant à ce que soit fait application de la directive du 4 novembre 2003 aux sapeurs-pompiers volontaires a fait l’objet d’un appel par le Service départemental d'incendie et de secours (SDIS) de la Moselle. Reste donc à savoir si la Cour administrative de Nancy viendra corroborer la reconnaissance de la qualité de travailleur aux sapeurs-pompiers volontaires du Comité des droits sociaux, et confirmer l’obligation pour les SDIS d’encadrer les heures de travail hebdomadaires des volontaires conformément aux dispositions du droit européen.

  • Arrivée de Rachel Lemoine

    Toute l’équipe d’Officio avocats est ravie de vous annoncer l'arrivée d'une nouvelle collaboratrice au sein de notre cabinet ! Bienvenue à Rachel Lemoine, qui nous rejoint après avoir développé ses compétences en conseil et en contentieux de la fonction publique, auprès du tribunal administratif de Paris et d'un cabinet dédié à la défense des agents publics pendant plus de deux années. Son engagement envers les agents de la fonction publique et sa passion pour le contentieux font d'elle une addition formidable à notre équipe. Nous sommes impatients de voir ce que ses compétences apporterons à notre travail et à la défense de nos clients ! L’équipe d’Officio avocats

  • Protection fonctionnelle et principe d'impartialité

    Par un arrêt du 26 janvier 2024 (req. n° 22PA04963), la Cour administrative d’appel de Paris a rappelé que le maire d’une commune ne pouvait se prononcer sur la demande de protection fonctionnelle portant sur des agissements qualifiables de harcèlement moral lui étant imputables et devait, auquel cas, déléguer sa compétence à l’un de ses adjoints. En l’espèce, le requérant, M. B…, a exercé en qualité d’attaché non titulaire, chargé de la politique de la ville de Fresnes pendant plus d’une dizaine d’années. Le 25 mai 2020, la maire de Fresnes lui a refusé le bénéfice de la protection fonctionnelle pour des faits de harcèlement moral dont il estimait avoir été victime de la part de la maire elle-même depuis 2017. Le tribunal administratif de Melun a annulé cette décision et lui a enjoint d’accorder le bénéfice de la protection fonctionnelle à M. B… . Ici, la question posée à la Cour administrative d’appel de Paris était de savoir si le supérieur hiérarchique accusé par un subordonné d’agissements constitutifs de harcèlement moral peut se prononcer sur sa demande de protection fonctionnelle ? Plus particulièrement, le maire d’une collectivité, nonobstant qu’il soit la seule autorité compétente pour se prononcer sur une demande d’octroi de la protection fonctionnelle, peut-il statuer sur la demande de l’un de ses subordonnés, au titre d’agissements dont il serait l’auteur ? La partialité du supérieur hiérarchique accusé de harcèlement moral Par un arrêt du 29 juin 2020, le Conseil d’État avait jugé qu’en vertu du principe d’impartialité qui s’impose à toute autorité administrative dans toute l’étendue de son action, le supérieur hiérarchique mis en cause à raison de ses agissements ne pouvait régulièrement statuer sur la demande de protection fonctionnelle présentée pour ce motif par son subordonné, quand bien même il serait en principe l’autorité compétente pour prendre une telle décision (CE, 29 juin 2020, M. Ledoux, req. n° 423996, Lebon p. 237) : 7. Il résulte du principe d’impartialité que le supérieur hiérarchique mis en cause à raison de tels actes ne peut régulièrement, quand bien même il serait en principe l’autorité compétente pour prendre une telle décision, statuer sur la demande de protection fonctionnelle présentée pour ce motif par son subordonné. Sur le fondement des dispositions de l’article 11 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, désormais codifié à l’article L. 134-1 du code général de la fonction publique, la Cour administrative d’appel de Paris a intégralement repris ce considérant de principe dans l’affaire étudiée : 13. Il résulte (…) du principe d’impartialité que le supérieur hiérarchique mis en cause à raison d’actes insusceptibles, à les supposer avérés, de se rattacher à l’exercice normal du pouvoir hiérarchique ne peut régulièrement, quand bien même il serait en principe l’autorité compétente pour prendre une telle décision, statuer sur la demande de protection fonctionnelle présentée pour ce motif par son subordonné. En l’espèce, les juges d’appels parisiens en ont déduit qu’en se prononçant elle-même sur la demande de protection fonctionnelle de M. B…, demande dirigée contre elle-même, la maire de Fresnes avait méconnu le principe d’impartialité. La désignation de l’autorité compétente pour se prononcer sur la demande de protection fonctionnelle S’agissant de la fonction publique hospitalière, le Conseil d’État avait estimé qu’il appartenait au directeur de l’établissement public de santé mis en cause de transmettre la demande au directeur général de l’agence régionale de santé dont relève l’établissement : « Il résulte de l’ensemble des dispositions qui gouvernent les relations entre les agences régionales de santé et les établissements de santé, notamment de celles de l’article L. 6143-7-1 du code de la santé publique qui donnent compétence au directeur général de l’agence régionale de santé pour mettre en œuvre la protection fonctionnelle au bénéfice des personnels de direction des établissements de santé de son ressort, que lorsque le directeur d’un établissement public de santé, à qui il appartient en principe de se prononcer sur les demande de protection fonctionnelle émanant des agents de son établissement, se trouve, pour le motif indiqué au point précédent, en situation de ne pouvoir se prononcer sur une demande sans méconnaître les exigences qui découlent du principe d’impartialité, il lui appartient de transmettre la demande au directeur général de l’agence régionale de santé dont relève son établissement, pour que ce dernier y statue. » De manière analogue, la Cour administrative d’appel de Douai a pu considérer qu’il revenait au maire, en cas d’impossibilité pour lui de se prononcer sur la demande de protection fonctionnelle, faute d’impartialité, de déléguer sa compétence : Aux termes de l’article L. 2122-18 du même code : « Le maire est seul chargé de l’administration, mais il peut, sous sa surveillance et sa responsabilité, déléguer par arrêté une partie de ses fonctions à un ou plusieurs de ses adjoints et à des membres du conseil municipal ». 8. Il résulte des dispositions précitées de l’article L. 2122-18 du code général des collectivités territoriales que le maire, qui n’aurait pas délégué cette fonction, est en principe compétent pour se prononcer sur une demande de protection fonctionnelle émanant des agents de sa commune. Toutefois, face à une telle demande qui viserait des faits de harcèlement moral le concernant personnellement et qui comporterait les éléments de fait susceptibles de faire présumer l’existence d’un harcèlement, tels que mentionnés au point 3, il se trouve en situation de ne pouvoir se prononcer sans méconnaître les exigences qui découlent du principe d’impartialité, et il lui appartient, pour le motif indiqué au point 6, de transmettre celle-ci à l’un de ses adjoints ou à l’un des conseillers municipaux dans les conditions prévues à l’article L. 2122-17 du même code. (CAA Douai, 24 mars 2022, n° 21DA01352) De ce fait, après avoir annulé la décision de la maire de Fresnes, la Cour administrative d’appel de Paris a enjoint à l’autorité territoriale de désigner l’un de ses adjoints afin qu’il examine la demande de protection fonctionnelle de M. B… dans un délai déterminé : 16. Le présent arrêt implique seulement qu’il soit enjoint, d’une part, à la maire de Fresnes, en principe seule chargé de l’administration en vertu de l’article L. 2122-18 du code général des collectivités territoriales, de prendre, dans le délai d’un mois à compter de la notification du présent arrêt, un arrêté désignant l’adjoint qui sera chargé de se prononcer, en toute indépendance, conformément aux dispositions précitées du décret du 31 janvier 2014, sur la demande de protection fonctionnelle présentée par M. B… et, d’autre part, à cet adjoint d’examiner cette demande dans le délai d’un mois à compter de sa désignation. Si la juridiction semble considérer que l’adjoint au maire ainsi désigné pourra se prononcer « en toute indépendance » sur la demande de protection fonctionnelle litigieuse, cette présomption interroge. En effet, il n’a pu échapper à la juridiction que les adjoints peuvent, sous réserve d’une délégation, exercer les fonctions de l’exécutif au sein des services de la collectivité. De ce fait, un adjoint – sans être directement désigné comme responsable des agissements qualifiables de harcèlement moral – pourrait ne pas y être étranger ou, plus simplement, par loyauté, chercher à protéger le maire des accusations portées contre lui. Dans ces circonstances, certaines juridictions du fond seront peut-être amenées à se prononcer également sur la partialité ou l’impartialité de l’adjoint désigné par le maire accusé de harcèlement moral, démonstration qui pourrait s’avérer bien plus difficile.

  • La motivation des décisions refusant la reconnaissance de l’imputabilité au service d’un accident au prisme du secret médical

    Dans cette affaire CE, 16 février 2024, req. n° 467533, Mentionné dans les tables du recueil Lebon, le Conseil d'État a consacré l'inopérance du moyen tiré de l'irrégularité de la motivation d'une décision administrative portant refus d'imputabilité au service en ce qu'elle ferait mention d'éléments permettant d'en déduire la nature de la pathologie, en violation du secret médical. En l'espèce, un agent de l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) a déclaré les 15 novembre et 3 décembre 2018 avoir été victime de deux accidents de service. Le premier, survenu le 24 octobre 2018, résulterait d’un choc psychologique lié à la modification de la configuration de son espace de travail. A la suite de ce premier événement, l’agent a exercé à deux reprises son droit de retrait et a ensuite été placée, à sa demande, puis d’office, en congé de maladie ordinaire. C’est alors qu’est survenu le second choc psychologique invoqué par l’agent, lorsqu’il lui est notifié, le 3 décembre 2018, son passage en demi-traitement à la suite de l’épuisement de ses droits à congés de maladie ordinaire à plein traitement. L’agent a sollicité la reconnaissance de l’imputabilité au service de ces deux événements, qu’elle qualifie d’accidents de service. En suivant les avis défavorables de la commission de réforme, la cheffe du département des ressources humaines de l’INSEE a rejeté ces demandes, par deux décisions du 15 mai 2019. Il s’agissait des décisions attaquées. Dans un premier temps, le Conseil d’État a dû examiner la problématique de la régularité formelle de la motivation de la décision portant refus de reconnaissance de l’imputabilité au service, en tenant compte des exigences de protection des secrets protégés. Se posait la question de savoir si la circonstance que la motivation d’un acte administratif méconnaîtrait un secret protégé par la loi est de nature à affecter la régularité formelle de cet acte ? Le Conseil d’État a jugé qu’il résulte des articles L. 211-2, L. 211-5, L. 211-6 et L. 311-6 du code des relations entre le public et l’administration (CRPA) ainsi que de l’article 26 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires (imposant le respect du secret professionnel désormais codifié à l’article L. 121-6 du code général de la fonction publique) que le refus de reconnaître l’imputabilité au service d’un accident est au nombre des décisions qui doivent être motivées. Si le respect des règles relatives au secret médical ne peut avoir pour effet d'exonérer l’administration de l'obligation de motiver sa décision, dans des conditions de nature à permettre au juge de l’excès de pouvoir d’exercer son contrôle, elle ne peut divulguer des éléments couverts par le secret médical. Toutefois, la circonstance que la décision comporterait de tels éléments n’est pas, par elle-même, susceptible de l’entacher d’illégalité. En effet, par cette décision, le Conseil d’État rappelle deux exigences qui s’imposent à l’administration à savoir la motivation des actes administratifs et le respect des secrets protégés par la loi. Pour le Conseil d’État, l’un n’empêche pas l’autre. S’agissant de la motivation des actes administratifs, il y a lieu de rappeler qu’il n’existe aucune obligation générale de motivation (CE, 30 avril 1880, Harouel et Morin c/ Ministre de la guerre, p. 419), le code des relations entre le public et l’administration impose seulement la motivation des décisions individuelles défavorables, notamment les mesures de police, les sanctions, les décisions qui imposent des prescriptions, les refus d’autorisation ou encore les dérogations. S’agissant du respect du secret, les agents publics sont soumis à l'obligation de secret professionnel dans le respect des articles 226-13 et 226-14 du code pénal. Elle leur impose de ne pas divulguer les informations personnelles concernant les usagers dont ils ont connaissance dans le cadre de leurs fonctions (art. L. 121-6 du code général de la fonction publique). La révélation de secrets professionnels, en dehors des cas où la loi l'impose ou l'autorise, est punie d'un an d'emprisonnement et de 15.000 € d'amende. Or, le Conseil d’État rappelle que la protection du secret médical prévue par l’article L. 1110-4 du code de la santé publique ne vise que les seuls professionnels de santé. Aussi comme le rappelle le rapporteur public Nicolas LABRUNE : « le respect des secrets protégés par la loi est une exigence qui s’impose à l’administration, il s’agit – sauf dans le cas où un texte spécifique en disposerait autrement – d’une règle de fond de l’action administrative, et pas d’une norme relative à la présentation matérielle des actes, dont la méconnaissance constituerait un vice de forme. » En conséquence, pour le Conseil d’État, lorsqu’une décision administrative est suffisamment motivée et dès lors qu’aucun texte ne fait du respect des secrets une prescription formelle, alors les exigences formelles qui s’imposent à cette décision sont respectées, de sorte qu’aucun vice de forme ne saurait être caractérisé, quand bien même la motivation de cette décision violerait un secret. Dans un second temps, le Conseil d’État a examiné le refus de l’imputabilité de l’accident au service qui prendrait naissance notamment par l’annonce d'une décision d'application du demi-traitement à l'issue d'une période de six mois en congé de maladie. D’une part, la Haute juridiction rappelle la définition de l’accident de service : constitue un accident de service un évènement survenu à une date certaine, par le fait ou à l'occasion du service, dont il est résulté une lésion, quelle que soit la date d'apparition de celle-ci (définition issue de la décision CE, 6 février 2019, req. n° 415975, T. pp. 798-870). Ainsi, pour qu’un événement soit qualifié d’accident de service, il faut tout d’abord qu’il puisse être regardé comme un accident, c’est-à-dire, un « événement soudain et violent » (CE, 27 septembre 2021, req. n° 440983, T. pp. 736-744). Le Rapporteur public Marc PICHON DE VENDEUIL dans cette décision avait précisé que : « (…) de manière générale, un tel entretien ne peut, à soi seul, constituer un accident de service car il s’agit, par définition, d’un « événement prévisible et normal dans la carrière professionnelle d’un agent public » (…). Le critère de l’action soudaine voire violente n’est certainement pas rempli a priori, même si, bien évidemment, un tel entretien peut devenir le cadre d’une action soudaine voire violente, que ce soit d’ailleurs sur le plan physique ou sur le plan psychologique. (…) Dès lors, il faut, nous semble-t-il, distinguer entre ce qui relève de l’exercice normal du pouvoir hiérarchique et ce qui relève d’un comportement anormal. Sous cet angle, il nous paraît évident que des remarques, des critiques, des reproches et même des admonestations relèvent de la première catégorie et ne sauraient donc être assimilés à un accident de service, quand bien même l’agent ne s’y attendrait pas ou en concevrait du dépit ou de la colère, voire quelque blessure d’amour-propre. Pour être qualifié d’accident de service, il faut, à l’inverse, que l’entretien donne lieu à un comportement ou à des propos excédant les limites raisonnables d’exercice du pouvoir hiérarchique : les insultes et injures, les brimades, les humiliations, la maltraitance physique ou psychique au cours d’un entretien relèveraient assurément d’un tel cas de figure. » Dès lors, le Conseil d’État, confortant le raisonnement de la cour, a jugé que l'annonce par la hiérarchie d'un réagencement des postes de travail au sein d'un service et la notification à un agent de la décision d'application du demi-traitement à l'issue d'une période de six mois en congé de maladie ordinaire relèvent de l'exercice ordinaire du pouvoir hiérarchique ne sauraient être regardées comme des événements soudains et violents, susceptibles d'être qualifiés d'accident de service alors même qu'elles se rattachent au service.

  • Protection fonctionnelle et vol des biens personnels

    Par une décision du 22 décembre 2023 (CE, 15 février 2024, req. n° 462435, Lebon T.), le Conseil d’État a jugé qu’un sapeur-pompier volontaire ne pouvait pas prétendre au bénéfice de la protection fonctionnelle en raison du vol de son véhicule personnel et de son matériel photographique sur les lieux et heures du service s’il n’apparaît pas que l’auteur du vol aurait eu la volonté de lui porter atteinte en sa qualité d’agent public. Monsieur B. est sapeur-pompier volontaire au sein du service départemental d’incendie et de secours (SDIS) de la Martinique. Dans la nuit du 20 au 21 mars 2017, des individus se sont introduits dans les locaux du centre de secours et ont dérobé de nombreuses affaires personnelles des agents, dont la clé du véhicule de Monsieur B. et son matériel photographique. La voiture de l’agent, stationnée aux abords du centre, a ensuite été volée. Monsieur B. a, par la suite, sollicité du SDIS l’indemnisation des préjudices matériel et moral qu’il estime avoir subis en raison de ce vol, pour un montant de 15 000 euros. Le SDIS ayant rejeté la demande de Monsieur B., ce dernier a saisi le tribunal administratif de la Martinique d’une demande tendant à l’indemnisation de ses préjudices. Le tribunal administratif a rejeté sa demande, tout comme la Cour administrative d’appel de Bordeaux après lui. Monsieur B s’est donc pourvu en cassation devant le Conseil d’État. La question posée au Conseil d’État était ainsi relativement simple : un sapeur-pompier volontaire, victime d’un vol d’effets personnels à l’occasion de ses fonctions, peut-il solliciter le bénéfice de la protection fonctionnelle ? Dans un premier temps de son raisonnement, sur le fondement des dispositions de l’article 11 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, dans sa version alors applicable et de l’article L.113-1 du code de la sécurité intérieure,  les sapeurs-pompiers volontaires peuvent bénéficier de la protection fonctionnelle : 3. Ces dispositions établissent à la charge de la collectivité publique et au profit des sapeurs-pompiers volontaires, lorsqu'ils ont été victimes d'attaques à l'occasion ou du fait de leurs fonctions, sans qu'une faute personnelle puisse leur être imputée, une obligation de protection à laquelle il ne peut être dérogé, sous le contrôle du juge, que pour des motifs d'intérêt général. (…) Dans un deuxième temps, la Haute juridiction, rappelle que le champ de la protection fonctionnelle s’étant également aux atteintes aux biens, atteintes pouvant par exemple résulter de faits de vol : (…) Cette obligation de protection a pour objet, non seulement de faire cesser les attaques auxquelles l'agent concerné est exposé, mais aussi de lui assurer une réparation adéquate des torts qu'il a subis, y compris ceux résultant d'une atteinte portée à ses biens. Le troisième temps du raisonnement va soulever davantage de difficultés pour le requérant. En effet, le Conseil d’État indique que la protection fonctionnelle ne serait due que si l’atteinte aux biens litigieuse a été subie en raison de la qualité de sapeur-pompier volontaire, et plus largement d’agent public de l’intéressé : (…) Cette protection n’est due, cependant, que lorsque les agissements concernés visent l’agent concerné à raison de sa qualité d’agent public. Cet élément relatif aux atteintes aux biens semble n’avoir jamais été précisé de la sorte par la jurisprudence. Un tel raisonnement n’avait pas été utilisé par le juge administratif depuis plusieurs décennies, lorsqu’il avait confirmé la recevabilité et le bien-fondé de la demande d’indemnisation d’un magistrat exerçant les fonctions de substitut du procureur de la République à Alger, ayant fait l’objet d’un pillage de son appartement et d’une spoliation de ses biens quelques semaines après le terme de la Guerre d’Algérie en 1962 : Cons. Qu’il resulte de l’instruction que c’est en raison des fonctions de commissaire du gouvernement pres le tribunal militaire de tizi-ouzou, puis de substitut du procureur de la republique a alger que le sieur x… a successivement exercees, que le mobilier de l’interesse a ete pille en aout 1962 a alger et que l’appartement qu’il occupait dans cette ville a fait l’objet d’une spoliation ; qu’a defaut d’avoir pu obtenir des autorites algeriennes reparation de ces prejudices dans les conditions prevues au protocole judiciaire, le requerant est fonde a demander cette reparation a l’etat francais ; (CE Ass., 6 novembre 1968, Benejam, req.n° 70282, Publié au recueil Lebon p. 545). En l’espèce, nonobstant le lieu, la temporalité et les circonstances du vol, le Conseil d’État va refuser le bénéfice la protection fonctionnelle au requérant au motif d’une absence de lien entre les fonctions exercées et le vol commis : 4. Il ne ressort pas des pièces du dossier soumis aux juges du fond que le vol du véhicule personnel et du matériel photographique de M. B... résulterait d'une volonté de lui porter atteinte en sa qualité de sapeur-pompier volontaire, quand bien même ce vol a été commis sur les lieux du service et pendant les heures de service de M. B ... . Il en ressort donc que Monsieur B. n’est pas fondé à demander l’annulation de l’arrêt en tant qu’il statue sur ce chef de préjudice, les faits en cause n’étant pas de nature à ouvrir droit au bénéfice de la protection fonctionnelle. En pratique, cette analyse des faits de l’espèce interroge à double titre : D’une part, comment être en capacité de prouver qu’une infraction pénale a été perpétrée en raison de la qualité d’agent public de la victime, surtout lorsque les auteurs n’ont pas été identifiés et n’ont pas expliqué leur geste ? D’autre part, comment considérer que le lien avec la qualité d’agent public est à exclure lorsque l’infraction a nécessité que son auteur se rende jusque dans le vestiaire professionnel de l’agent ? S’il n’est pas possible de sonder l’auteur pour vérifier que le vol est motivé par la qualité de sapeur-pompier de l’agent, cette qualité ne lui était pas inconnue. De ce fait, l’absence de protection peut sembler d’autant plus surprenante. Une catégorie d’agents publics subit régulièrement ce raisonnement : les représentants du personnel. En de multiples occasions, ces derniers se sont vu refuser le bénéfice de la protection fonctionnelle dès lors que les injures, diffamations ou attaques subies l’avaient été en raison de leurs fonctions syndicales et non de leurs fonctions d’agents publics : Ainsi, quand bien même l’altercation avec des collègues membres d’une autre organisation syndicale est survenue sur les lieux où se tenaient les élections organisées par l’administration, l’agression au titre de laquelle M. B… a sollicité la protection fonctionnelle constitue un évènement survenu à l’occasion de l’accomplissement de fonctions syndicales et n’est, dès lors, pas rattachable à l’exercice de ses fonctions d’agent public. Par suite, la CIREST est fondée à soutenir que le tribunal administratif de La Réunion ne pouvait accueillir le moyen tiré de l’inexacte application de la loi pour annuler la décision contestée portant refus de protection fonctionnelle. (CAA Bordeaux, 20 juin 2023, req. n° 21BX02147) Il ressort des pièces du dossier que le contenu des propos tenus par M. E lors de cette interview était une prise de position syndicale, à caractère polémique, effectuée au nom et pour le compte de son syndicat, organisme privé, et sans relation avec l’exercice de ses fonctions. (CAA Bordeaux, 25 avril 2022, req. n° 20BX00361) 8. D’autre part, il résulte de ces dispositions qu’une collectivité publique doit accorder la protection fonctionnelle à l’agent public qui en revendique le bénéfice lorsqu’il fait l’objet d’attaques qui sont en lien avec l’exercice de ses fonctions et qui ne constituent pas une faute personnelle de l’agent. En revanche, n’ouvrent pas droit à cette protection les faits qui découlent du comportement d’un agent en sa qualité de représentant du personnel. (CAA Toulouse, 13 décembre 2022, req. n° 20TL20669) Là aussi le refus de protection fonctionnelle interroge dès lors que la qualité de représentant syndical n’est possible que pour un agent public exerçant ses fonctions au sein de la collectivité ou de l’établissement concerné. S’ils étaient poussés à l’extrême, ces raisonnements pourraient s’avérer contre-productifs : quelle agression sexuelle est liée à la qualité de fonctionnaire de sa victime ? Faudrait-il sonder l’usager injuriant une secrétaire de mairie afin de savoir s’il a conscience d’attaquer un agent public ? Quid de l’agression physique, par un patient, d’un agent hospitalier en tenue civile parce qu’il s’apprête à prendre ou à quitter son service ? En l’espèce, faute de protection fonctionnelle, il ne restera plus qu’à Monsieur B. d’espérer obtenir l’indemnisation de son préjudice sur le fondement du défaut de surveillance et de protection des locaux du SDIS. En effet, sur ce second moyen évoqué par le requérant, le Conseil d’État a estimé qu’en ne se prononçant pas sur l’argumentation tirée de la vétusté et du défaut de surveillance des locaux, de l’absence de sécurisation des fenêtres et d’éclairage extérieur (un vol ayant déjà été commis dans l’enceinte du local vandalisé pour lequel le SDIS n’avait pas mis en œuvre les mesures correctrices nécessaires), la cour administrative d’appel de Bordeaux a insuffisamment motivé sa décision. L’affaire est donc renvoyée devant la cour administrative d’appel de Bordeaux afin qu’il y soit statué.

  • Newsletter de mars 2024

    Chaque mois, nous partageons l'actualité du droit de la fonction publique et du cabinet, à travers nos analyses ainsi que des commentaires et liens que nous avons recueillis et sélectionnés pour vous. Bonne lecture ! LIEN VERS LA NEWSLETTER

  • Maintien, sous conditions, de la mise à l’écart d’un agent public après une suspension conservatoire par un changement d’affectation

    Par un arrêt du 4 mars 2024 (CAA Paris, 4 mars 2024, M. D. c/ Ministre de l’Europe et des affaires étrangères, req. n° 22PA03904), la cour administrative d’appel de Paris a confirmé la légalité d’une mesure de changement d’affectation d’un agent public à l’issue d’une période de suspension conservatoire, le retour de l’agent en service étant incompatible avec son fonctionnement et la procédure engagée suite aux évènements ayant conduit à sa suspension étant toujours en cours d’instruction. M. D., conseiller du corps diplomatique, était numéro deux de l’ambassade de France à Moroni (Comores). Le ministère a été saisi d’un signalement relatifs à des comportements de Monsieur D. susceptibles d’être qualifiés de harcèlement voire d’agression sexuelle à l’égard d’une agente du poste diplomatique. Il a donc fait l’objet d’une mesure de suspension conservatoire (articles L. 531-1 et suivants du code général de la fonction publique) par arrêté du 8 octobre 2019, laquelle avait une durée maximale, comme le prévoit les textes précités, de quatre mois. Une enquête administrative a été diligentée afin de faire la lumière sur les faits signalés. Mais l’enquête prenant du temps, celle-ci n’était pas terminée à l’expiration de la période maximale de quatre mois prévue par la suspension conservatoire. A son issue, en février 2020, le ministre de l’Europe et des affaires étrangères a donc décidé de procéder au changement d’affectation de Monsieur D. et de lui attribuer un poste en administration centrale, ce afin d’empêcher son retour au sein du poste diplomatique de Moroni. Monsieur D., qui a fini par faire l’objet d’une exclusion temporaire de fonctions de deux mois en juillet 2020, a contesté la décision de changement d’affectation, invoquant, entre autres, qu’elle revêtait le caractère de sanction déguisée. Le tribunal administratif de Paris ayant rejeté sa demande, Monsieur D. a saisi les juges d’appel parisiens, qui ont donc dû se pencher sur la légalité d’une telle mesure de changement d’affectations faisant immédiatement suite à une mesure de suspension conservatoire. Le changement d’affectations pour mettre fin à des problématiques d’ordre relationnel au sein du service : une mesure depuis longtemps validée par les juges administratifs Il est constant que l’autorité administrative procède aux mutations et affectations des fonctionnaires selon l’intérêt du service (article L. 512-18 et L. 512-23 du code général de la fonction publique). C’est cette dernière notion qui motive les mutations et changements d’affectation. Une décision de changement d’affectation peut ainsi tout à fait être justifiée par une volonté de rationaliser et d’améliorer l’organisation des services (CE, 27 octobre 1982, Roudy Paul, req. n° 21670). Mais la décision de changement d’affectation et sa motivation tirée de l’intérêt du service peut tout à fait reposer sur des considérations liées à la personne de l’agent concerné. Le juge administratif valide ainsi depuis longtemps le choix de procéder à un changement d’affectation pour mettre fin à des conflits relationnels au sein d’une équipe (CE, 27 mars 2009, M. G. c/ CH de Néris-les-Bains, req. n° 301468), que la responsabilité du conflit soit ou non de la responsabilité de l’agent ainsi muté (CAA Nantes, 4 octobre 2002, M. D. c/ Commune de Saint-Jean-la-Ruelle, req. n° 00NT01556). Dans de telles situations, la décision frôle néanmoins bien souvent la sanction déguisée. Le contrôle de l’absence de sanction déguisée Les mesures de changement d’affectation sont bien souvent considérées comme des mesures d’ordre intérieur, c’est-à-dire insusceptibles de recours. Par une jurisprudence bien établie (CE Sect., 25 septembre 2015, Bourjolly, req. n° 372624), le juge administratif considère ainsi que sont insusceptibles de recours, bien qu’elles modifient l’affectation d’un agent ou les tâches à accomplir, les mesures qui : Ne portent pas atteinte aux droits et prérogatives que l’agent tient de son statut ou à l'exercice de ses droits et libertés fondamentaux ; Et n'emportent pas de perte de responsabilités ou de rémunération. Il reste que l’administration peut en réalité vouloir sanctionner son agent par une telle mesure. Or, les sanctions disciplinaires sont limitativement énumérées par l’article L. 533-1 du code général de la fonction publique. Si le changement d’affectation d’office existe pour la seule fonction publique de l’État, son prononcé (sanction du deuxième groupe) suppose le respect d’une procédure disciplinaire préalable. Pour vérifier si une mesure de changement d’affectation n’est pas constitutive d’une sanction déguisée, le juge examine si l'administration a eu l'intention de sanctionner l'agent, si la décision porte atteinte à la situation professionnelle de ce dernier (par exemple par un véritable déclassement), et si elle est réellement motivée par les nécessités du service (CE, 25 février 2013, Mme B. c/ CCAS de la ville de Fontaine, req. n° 348964). Or, si la proximité temporelle d’une mesure de changement d’affectation avec une sanction disciplinaire ne suffit pas à la qualifier de sanction déguisée (CAA Nancy, 19 juillet 2018, M. E. c/ Commune d’Epernay, req. n° 17NC02273), le juge annule un changement d’affectation motivé uniquement par des faits qui ont déjà fait l’objet d’une sanction disciplinaire (CAA Bordeaux, 2 juillet 2002, Ville d’Albi, req. n° 98BX02058). Dans l’affaire ici commentée, la succession immédiate du changement d’affectation de Monsieur D. à l’issue de sa suspension conservatoire, mesure prise dans le cadre d’une procédure disciplinaire en cas de « faute grave », pour l’empêcher de retrouver son poste à l’issue de sa mise à l’écart, pouvait naturellement suggérer la possibilité d’une sanction déguisée. La cour administrative d’appel de Paris a très exactement procédé à l’analyse habituelle rappelée ci-avant pour justifier la légalité du changement d’affectations de Monsieur D. à l’issue de sa suspension conservatoire. La cour rappelle ainsi tout d’abord qu’ « Un changement d'affectation revêt le caractère d'une sanction disciplinaire déguisée lorsque, tout à la fois, il en résulte une dégradation de la situation professionnelle de l'agent concerné et que la nature des faits qui ont justifié la mesure ainsi que l'intention poursuivie par l'administration révèlent une volonté de sanctionner cet agent. » La cour a ensuite recherché, et validé, le motif d’intérêt du service retenu : « En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que, par la décision en litige, le ministre de l'Europe et des affaires étrangères a prononcé le changement d'affectation de M. D..., dans l'intérêt du service, à la fin de la suspension à titre conservatoire de l'agent, alors qu'une enquête administrative était diligentée à son encontre, au motif que sa réintégration au sein de l'ambassade de France aux Comores n'était pas envisageable dans la mesure où la procédure engagée suite aux évènements ayant motivé sa suspension était encore en cours d'instruction et que son retour dans ce service n'était pas compatible avec les impératifs d'un fonctionnement serein de celui-ci. » Tout en constatant qu’il n’était pas porté atteinte à la situation professionnelle de Monsieur D. : « Dès lors que l'administration dispose d'un pouvoir d'appréciation, qu'indépendamment de toute sanction, elle peut tirer des faits des conséquences en matière de gestion et que les mesures contestées ne portent pas atteinte à la situation professionnelle de l'agent, le maintiennent dans des fonctions correspondant à son statut, M. D..., qui soutient sans l'établir et sans autres précisions que sa nouvelle affectation était fictive, qu'il aurait consécutivement été évincé de ses fonctions et été dépourvu des responsabilités y afférentes, n'est pas fondé à soutenir que ce changement d'affectation constituerait une sanction déguisée. » Il s’agit là d’une subtile distinction, déjà opérée dans les jurisprudences précitées, entre la motivation d’un changement d’affectation visant à sanctionner les faits (par « punition »), qui relève de la sanction déguisée, et celle – légale – visant, comme l’indique la cour, à « tirer des faits des conséquences en matière de gestion », c’est-à-dire à tenir compte de faits potentiellement disciplinaires sur le fonctionnement du service et l’incidence d’un maintien ou non de l’agent dans ledit service. Le piège de la preuve des faits Il ne faut pas pour autant voir dans cette décision de la cour administrative d’appel de Paris une validation de principe de tout changement d’affectation à l’issue d’une période de suspension conservatoire au seul motif d’une telle suspension. En effet, si la suspension conservatoire, qui conduit bien souvent à une enquête administrative – comme c’était le cas en l’espèce – pour vérifier la réalité des faits signalés, est légale simplement si les faits présentent, à la date de la décision, outre une gravité particulière, un caractère de vraisemblance suffisant (CE, 11 juin 1997, Nevez, req. n° 142167), tel n’est pas le cas de la motivation d’un changement d’affectation. Il serait trop aisé pour l’administration, validant la légalité d’une suspension conservatoire par la simple vraisemblance de faits signalés, de « poursuivre » la mise à l’écart du service de l’agent par un changement d’affectation à son issue sans avoir à justifier des faits sur lesquels reposent ce changement d’affectation. L’administration doit en effet prouver avec certitude l’intérêt du service invoqué pour justifier une mesure de changement d’affectation (CAA Lyon, 20 novembre 1998, Decaudin, req. n° 95LY00769 ; CAA Marseille, 29 mai 2001, Commune de Forcalquier, req. n° 99MA01640). Il peut ainsi être délicat pour une administration d’apporter la preuve concrète des faits ayant donné lieu à suspension quatre mois plus tard, alors, par exemple, qu’une enquête est en cours. Les faits relevés par la décision ici commentée étaient très probablement d’une particulière gravité et c’est également probablement l’ensemble des circonstances propres à l’espèce (petit service, faits d’une grande gravité, caractère déjà très corroboré des faits à l’issue de la suspension par les débuts de l’enquête…) qui ont conduit le juge à considérer que l’intérêt du service était établi lors du prononcé du changement d’affectations. C’est ainsi toujours avec parcimonie que l’administration doit manier le changement d’affectations dans un contexte disciplinaire.

  • L’illégalité des « heures négatives »

    Par un arrêt Conseil d'État, syndicat Solidaire unitaire démocratique (SUD) des sapeurs-pompiers professionnels, agents techniques et administratifs du service départemental d’incendie et de secours (SDIS) de la Drôme, 26 février 2024, req. n° 453669, le Conseil d’État a jugé que les heures de travail non effectuées par les agents n’étaient pas reportables d’une année à l’autre. En l’espèce, par une délibération du 18 décembre 2013, le bureau du conseil d’administration de ce SDIS a approuvé la modification du guide de gestion du temps de travail des personnels du SDIS de la Drôme à compter du 1er janvier 2014, afin de prévoir : Que l’écart constaté en moins entre le service annuel horaire effectué par un agent et le volume annuel de travail de 1 583 heures auquel il est soumis était défalqué du compte épargne-temps de l’agent l’année suivante ; Et, qu’en dehors du cas où il est fait usage de cette faculté, le même écart est reporté sur les obligations horaires de l’année suivante Le syndicat Solidaire unitaire démocratique (SUD) des sapeurs-pompiers professionnels, agents techniques et administratifs du service départemental d’incendie et de secours (SDIS) de la Drôme a demandé au tribunal administratif de Grenoble d’annuler la délibération litigieuse, au motif qu’elle méconnaissait les règles régissant le temps de travail des agents publics. Les premiers juges ont annulé la délibération en tant qu’elle approuve les dispositions prévoyant que l’écart négatif constaté entre le service annuel horaire effectué par un agent et le volume annuel de travail de 1 583 heures auquel il est tenu est défalqué du compte épargne-temps de l’agent l’année suivante et rejeté le surplus des conclusions de la demande du syndicat, décision confirmée par la Cour administrative d’appel de Lyon. Sur le fondement des dispositions du décret du 25 août 2000 relatif à l’aménagement et à la réduction du temps de travail dans la fonction publique de l’État et dans la magistrature, le Conseil d’État a rappelé que si des reports infra-annuels de déficits ou d’excédents horaires entre périodes de référence étaient permis, tel n’était cependant pas le cas d’une année à l’autre : (les dispositions précitées) fixent pour le décompte du temps de travail un maximum annuel à respecter, sans préjudice des heures supplémentaires, quelle que soit l’organisation en cycles de travail. Dès lors, si elles permettent à l’autorité compétente de prévoir, dans les conditions fixées au troisième alinéa de l’article 6 du décret du 25 août 2000, des reports infra-annuels de déficits ou d’excédents horaires entre périodes de référence, elles font en revanche obstacle à ce que l’écart constaté entre le service annuel horaire effectué par un agent et le volume annuel de travail auquel il est soumis puisse avoir pour effet de modifier, par report, ses obligations horaires de l’année suivante. » Si le Conseil d’État a fondé son raisonnement sur le principe de l’annualisation du temps de travail, le refus de report des heures « négatives » d’une année à l’autre peut également reposer sur la circonstance, encore plus pragmatique, qu’il revient réglementairement à l’administration, et plus précisément au chef de service, de fixer les horaires de travail des agents, afin de s’assurer qu’ils remplissent l’ensemble de leurs obligations annuelles : L'aménagement et la répartition des horaires de travail sont fixés par le chef d'établissement, après avis du comité social d'établissement ou du comité social et compte tenu de la nécessité d'assurer la continuité des soins ou de la prise en charge des usagers, les dimanches, les jours fériés et la nuit. (article 8 du décret n°2002-9 du 4 janvier 2002 relatif au temps de travail et à l'organisation du travail dans les établissements mentionnés à l'article 2 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière) C’est sur le fondement de ces dispositions que le tribunal administratif de Lyon a récemment censuré la décision du centre hospitalier de Bourg-en-Bresse rejetant la demande d’une agente sollicitant que son décompte d’heures soit remis à zéro au 1er janvier de l’année 2022 : Le chef d’établissement, qui arrête les horaires de travail s’imposant aux agents dans un tableau de service, ne peut, lorsqu’il fixe des horaires ne leur permettant pas de remplir leurs obligations horaires dans le cycle de travail, leur imposer de récupérer les heures ainsi perdues lors du cycle suivant, sauf circonstances exceptionnelles. (TA Lyon, 9e ch., 16 févr. 2024, n° 2206526) S’il s’agit de la première fois que le Conseil d’État se prononce expressément sur le sujet, les juridictions du fond ont commencé à adopter cette solution depuis 2010. Ainsi, par deux jugements des 25 mars 2010 et 7 juin 2012, le tribunal administratif de Dijon avait d’ores-et-déjà censuré les décisions de centres hospitaliers visant à retrancher des congés ou à reporter sur l’année suivante les heures non réalisées par l’agent : Considérant que tant le principe de l’annualité du temps de travail que le principe de l’annualité des congés résultant des textes précités excluent le recours au procédé des congés par anticipation qui a pour effet de générer, pour l’agent, un compteur d'« heures négatives » ; (…) que le Centre hospitalier de Nevers a reporté l’exécution des 92 heures restant dues sur l’année 2005 ; qu’il ressort du bilan annuel de 2005 que Mme X a effectué, au titre de 2005, 1686 heures ; qu’il en est résulté un excédent de 104 heures ; que le Centre hospitalier de Nevers a retranché des congés non pris par la requérante à ce nombre d’heures ; que, toutefois, aucune disposition législative ou réglementaire et en particulier les dispositions précitées de l’article 4 du décret n° 2002-8 du 4 janvier 2002 ne l’autorisaient à procéder ainsi ; que, dès lors, le moyen tiré de l’erreur de droit doit être accueilli ; (TA Dijon, 25 mars 2010, req. n° 0700960) qu’il résulte de ces dispositions que le principe de l’annualité des congés exclut le report des congés sur l’année suivante et que la durée annuelle de travail effectif ne doit pas être supérieure à 1 607 heures, sauf heures supplémentaires susceptibles d’être effectuées ; (…) que le centre hospitalier en procédant au report des heures non effectuées d’une année sur l’autre, jusqu’en 2009 a nécessairement porté la durée annuelle de travail effectif de M. Z au-delà des 1 607 heures légales en méconnaissance des disposition précitées des décrets n° 2002-8 et 2002-9 susvisés ; (TA Dijon, 7 juin 2012, req. n° 1100619) Longtemps, ces décisions sont restées isolées, avant que le sujet ne redevienne d’actualité ces trois dernières années du fait d’une pratique de certains SDIS et établissements publics de santé : 7. Il résulte de ces dispositions que le décompte du temps de travail est réalisé sur la base d’une durée annuelle de 1 607 heures au maximum et que le principe d’annualisation du temps de travail exclut la possibilité de reporter les heures non effectuées au sein de cycles de travail au-delà de l’année suivante, de manière illimitée dans le temps. (…) Le directeur de l’EHPAD a entendu reporter l’exécution des heures non travaillées par Mme A… par rapport au volume annuel de 1 607 heures exigible, au titre des années 2016, 2017 et 2018 dites « heures négatives », sur son compte annuel de travail de l’année 2019 (…) C’est ainsi à bon droit que les premiers juges ont annulé les décisions refusant de supprimer le solde d’heures négatives accumulées au cours des années 2016, 2017 et 2018, du compte annuel de travail de l’année 2019 de Mme A…. (CAA Douai, 2e ch., 22 mars 2022, n° 21DA00033) 4. Il ressort des pièces du dossier que, au cours des années 2014 à 2019, Mme B était positionnée sur un cycle de nuit, à raison de 32,45 heures par semaine. Elle soutient en outre, sans être contredite, que, au cours de ces mêmes années, son temps de travail n’a pu atteindre la durée légale de travail annuel de 1607 heures en raison des nombreuses fermetures du service dans lequel elle était affectée (l’unité de chirurgie réparatrice esthétique – chirurgie de la main). Le CHU a entendu reporter l’exécution des heures non travaillées par Mme B par rapport au volume annuel de 1607 heures exigible, au titre des années 2014, 2015, 2016, 2017 et 2018, sur son compte annuel de travail de l’année 2019. Toutefois, en procédant ainsi au report de l’ensemble des « heures négatives » sur la période de cinq années, au-delà d’une durée d’une année, l’administration a méconnu le principe du décompte annuel du temps de travail qui implique que le report des heures non effectuées au sein de cycles de travail se fasse sur une durée qui n’excède pas un an. 5. Il résulte de ce qui précède que la décision du CHU refusant de faire droit à la demande de Mme B tendant à la suppression de son solde d'« heures négatives » doit être annulée. (TA Nice, 3e ch., 24 mai 2023, req. n° 2001355) En pratique, cette décision a pour conséquence de contraindre les établissements à anticiper ou pallier des éventuelles fermetures de services ou ralentissements d’activité, sans avoir recours à la modulation du temps de travail des agents, qui se retrouveraient avec une « dette » de temps de travail.

  • L'accident de service : une définition identique pour deux régimes différents

    Par cette décision CE, 19 janvier 2024, req. n°469095, Inédit au recueil Lebon, le Conseil d’État précise que, parce que la définition de l’accident de service est la même dans les régimes d’octroi de l’allocation temporaire d’invalidité (ATI) et de congé temporaire imputable au service (CITIS), l’administration doit disposer « d’une bonne raison pour donner à un accident une qualification différente selon que sont en cause les congés maladies ou l’allocation temporaire d’invalidité » comme l’expose son rapporteur public. Dans les faits, une agente civile en poste dans un hôpital d'instruction des armées, a été victime le 4 avril 2012, alors qu'elle regagnait son domicile, d'un accident de la circulation. Celui-ci a été reconnu imputable au service par décision du ministre de la Défense du 1er février 2013. Puis, par une décision du 2 juin 2015, l’agente s'est vue reconnaître un taux d'invalidité permanente de 70 % au titre des séquelles de cet accident de trajet, avec une date de consolidation fixée au 10 septembre 2014, et a bénéficié de la prise en charge de ses arrêts de travail au titre de la législation sur les accidents de service. Par décision du 29 mars 2019, la ministre des Armées a toutefois informé l’agente du refus du service des retraites de l'État de lui accorder le bénéfice de l'allocation temporaire d'invalidité au titre des séquelles de l'accident de service, au motif que les affections dont elle souffre étaient entièrement étrangères à l’accident de trajet survenu en 2012. Par un jugement du 29 mars 2021, le tribunal administratif de Bordeaux a confirmé cette décision de refus, appelant plusieurs observations. Premièrement, le litige relatif au versement de l’allocation temporaire d’invalidité et de la rente viagère d’invalidité constitue un litige en matière de pensions au sens des dispositions du 7° de l’article R. 811-1 du code de justice administrative (CE, avis 23 octobre 2017, req. n° 412285, au Recueil, conclusions Gilles Pellissier). Dès lors, le Conseil d’État est seul compétent pour connaître de la contestation du jugement précité. Deuxièmement, par son arrêt, le Conseil d’État rappelle tout d’abord la définition de l’accident de trajet revêtant le caractère d’un accident de service : « est réputé être un accident de trajet tout accident qui se produit sur le parcours habituel entre le lieu où s’accomplit son travail et sa résidence et pendant la durée normale pour l’effectuer, sauf si un fait personnel de cet agent ou toute autre circonstance particulière est de nature à détacher l’accident du service ». Troisièmement, le Conseil d’État confirme les apports de sa décision CE, 6 février 2019, Mme Planage, req. n° 415975, aux Tables, aux termes de laquelle « constitue un accident de service, pour l’application de la réglementation relative à l’allocation temporaire d’invalidité, un évènement survenu à une date certaine, par le fait ou à l’occasion du service, dont il est résulté une lésion, quelle que soit la date d’apparition de celle-ci ». Pour rappel, l’allocation temporaire d'invalidité doit être regardée comme ayant pour objet de réparer les pertes de revenus et l'incidence professionnelle résultant de l'incapacité physique causée par un accident de service (CE, 16 décembre 2013, Centre hospitalier de Royan, req. n° 353798, aux Tables). Cette allocation est ouverte, aux termes de l’article 65 de la loi du 11 janvier 1984 applicable au litige (codifié à l’article L824-1du code général de la fonction publique), au fonctionnaire « atteint d'une invalidité résultant d'un accident de service ayant entraîné une incapacité permanente d'au moins 10 % ». Ainsi, la définition de l’accident de service est identique que ce soit dans le cadre de la réglementation relative aux congés maladies ou de la réglementation relative à l’allocation temporaire d’invalidité. Néanmoins, il existe une forme d’indépendance entre le régime des congés maladies et celui de l’allocation temporaire d’invalidité même si la définition est identique. Le Conseil d’État avait précisé que « la circonstance qu’un agent public a été placé en congé de maladie pour accident de service, avec effet à compter d’un événement donné, était sans incidence sur la qualification de cet évènement au regard des dispositions relatives à l'attribution de l’ATI ». La haute juridiction en déduit ici que l’identité de la définition de l’accident de service dans le cadre du régime de congé maladie et dans le régime de l’allocation pour invalidité doit conduire l’administration à ne donner une qualification à l’accident une qualification différente que si elle dispose d’éléments circonstanciés. En l’espèce, le Conseil d’État, se fondant sur l’avis de la commission de réforme et les avis des 4 experts, considère que si l’agente souffre, depuis son accident, d’affections neurologiques, ce n’est pas du fait de sa perte de connaissance en elle-même, mais parce que cette perte de connaissance est survenue alors qu’elle était au volant, pendant une période couverte par le service. Par cette appréciation, le Conseil d’État reprend le raisonnement selon lequel la circonstance qu’un accident de service soit causé par une pathologie préexistante de l’agent ne signifie pas que les séquelles de cet accident sur l’agent ne soient pas imputables à l’accident. Pour qu’une affection soit imputable à un accident de service, il suffit en effet qu’elle ait avec lui un lien direct (CE, 8 mars 2023, req. n° 456390, aux Tables) et peu importe les causes de cet accident de service. Ce n’est que si l’affection n’est pas une séquelle de l’accident et qu’elle est en réalité intégralement due à une pathologie préexistante que l’imputabilité ne sera pas caractérisée. En jugeant que ne sont pas imputables à un accident de service les infirmités neurologiques d’aphasie et d’épilepsie dont Mme C... reste atteinte à la suite de son accident de trajet au motif, donc, que cet accident est lui-même survenu à l’occasion d’une perte de connaissance liée à une pathologie préexistante, le tribunal administratif de Bordeaux a inexactement qualifié les faits de l'espèce.

  • Offres de stage

    Créé en 2017, Officio avocats est un cabinet jeune, convivial et dynamique, entièrement dédié au droit de la fonction publique, dont la clientèle est composée de particuliers (agents publics), d’organisations syndicales de représentation du personnel et d’administrations (État, territoriales, hospitalières) sur tout le territoire français. En pleine expansion, le cabinet souhaite recruter : un·e stagiaire M2, pour ce printemps 2024 ; un·e stagiaire élève-avocat·e, pour le second semestre 2024. Vous travaillerez au sein d’une équipe composée de deux avocats associés et de trois avocats collaborateurs, dans nos locaux situés à toute proximité de la Place de la République (Paris 11e), qui hébergent également d’autres avocats (domiciliés et sous-locataires). Au cours de ce stage, vous serez en charge de la réalisation de recherches juridiques et d’articles. En binôme avec un avocat, vous pourrez participer à la rédaction de consultations juridiques et d’actes contentieux. Vous aurez également l’occasion d’accompagner les avocats du cabinet aux audiences devant les juridictions administratives voire lors des formations ou permanences juridiques. Un cursus universitaire en droit public est indispensable, avec notamment un enseignement en contentieux public. Une connaissance du droit de la fonction publique est préférable.

  • La prolongation d'activité après la limite d'âge

    Dans une décision du 22 décembre 2023 (Conseil d’État, 22 décembre 2023, ministre de l’Économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique c/ M.P, req. n°472933), le Conseil d’État a jugé qu’un fonctionnaire pouvait être maintenu en activité au-delà de la limite d’âge de départ à la retraite lorsqu’il a obtenu son autorisation initiale de maintien avant sa date limite de départ, puis se voir accorder, sous conditions, des autorisations de prolongation. Monsieur P travaillait, au moment de son départ à la retraite, en tant qu’agent technique au musée du Louvre. N’ayant pas le nombre de trimestres suffisants pour obtenir une pension à taux plein, Monsieur P a sollicité, plus de six mois avant d’atteindre sa limite d’âge de départ à la retraite, une demande de prolongation d’activité sur le fondement de l’article 1-1 de la loi du 13 décembre 1984 relative à la limite d’âge dans la fonction publique et le secteur publique, aujourd’hui codifié à l’article L. 556-5 du code général de la fonction publique. Cette demande de prolongation n’a reçu une réponse favorable que dans la limite de deux trimestres, invitant Monsieur P à renouveler sa demande tous les six mois. C’est ce que Monsieur P fit et il obtint finalement, 5 renouvellements de deux trimestres (10 trimestres en tout). Au moment de calculer les droits à retraite de Monsieur P, le service des retraites de l’État a refusé de prendre en compte ses 8 derniers trimestres d’activité au motif que les quatre demandes de prolongation auxquelles ils se rattachent ont été faites postérieurement à sa limité d’âge (65 ans en l’espèce). Dans ce contexte, Monsieur P n’a eu d’autre choix que s’en remettre au tribunal administratif de Paris qui a fait droit à sa demande d’annulation du titre de pension litigieux et d’injonction en révision du montant de sa pension. Le ministre de l’économie a interjeté appel devant le Conseil d’État. A titre liminaire, il convient de préciser que l’article 1-1 de la loi du 13 juillet 1984 relative à la limite d’âge dans la fonction publique et le secteur public prévoyait, dans sa version alors applicable, que : « Sous réserve des droits au recul des limites d'âge reconnus au titre des dispositions de la loi du 18 août 1936 concernant les mises à la retraite par ancienneté, les fonctionnaires dont la durée des services liquidables est inférieure à celle définie à l'article L. 13 du code des pensions civiles et militaires de retraite peuvent, lorsqu'ils atteignent les limites d'âge applicables aux corps auxquels ils appartiennent, sur leur demande, sous réserve de l'intérêt du service et de leur aptitude physique, être maintenus en activité. La prolongation d'activité prévue à l'alinéa précédent ne peut avoir pour effet de maintenir le fonctionnaire concerné en activité au-delà de la durée des services liquidables prévue à l'article L. 13 du même code ni au-delà d'une durée de dix trimestres. Cette prolongation d'activité est prise en compte au titre de la constitution et de la liquidation du droit à pension ». Si le Conseil d’État avait jugé que la demande initiale de prolongation d’activité devait être impérativement présentée avant que l’agent ait atteint la limite d’âge de départ à la retraite (Conseil d’Etat, S, 11 juillet 1991, req. n°87026), l’interrogation restait entière pour les nouvelles demandes postérieures à cette date. Le bon sens voudrait que l’agent qui s’est vu imposer la nécessité de solliciter sa prolongation tous les trimestres ne puisse se voir opposer une quelconque forclusion au moment des demandes de renouvellement ultérieures. C’est pourtant l’inverse que soutenait le ministre : aucune nouvelle demande de prolongation ne pouvait, selon lui, être présentée après la limite d’âge. Pour appuyer sa défense, Ministère arguait d’une jurisprudence du Conseil d’État considérant que le maintien en activité du fonctionnaire n’a pas pour effet de reculer la limite d’âge qui lui est applicable (Conseil d’État, C, 5 décembre 2011, req. n°338688), avant d’en conclure qu’il fallait par conséquent appliquer à toutes les demandes de prolongation le même raisonnement que pour la demande initiale (dépôt avant que l’agent ait atteint cette limite d’âge). Le ministre soutenait donc que Monsieur P aurait dû déposer avant ses 65 ans, 5 demandes de prolongation, anticipant l’atteinte de la limite d’âge et les périodes qui suivaient. Le Conseil d’État n’a pas suivi le raisonnement du ministre, interprétant l’article 1-1 de la loi du 13 septembre 1984 dans un sens favorable à Monsieur P : « 3. Il résulte de ces dispositions que lorsqu’un agent a obtenu, avant la survenance de la limite d’âge, l’autorisation de prolonger son activité au-delà de celle-ci, l’administration peut, sous réserve de l’intérêt du service et de son aptitude physique, lui accorder, y compris après la limite d’âge, d’autres autorisations successives de prolongation d’activité, dans la limite globale de dix trimestres, dès lors que chacune de ces décisions intervient avant la rupture du lien de l’agent avec le service sans avoir pour effet de le maintenir en activité au-delà de la durée des services nécessaire à l’obtention du pourcentage maximum de la pension ». Autrement dit, si la demande de prolongation d’activité initiale doit bien intervenir avant que l’agent ait atteint la limite d’âge, tel n’est pas le cas des demandes de prolongation, qui peuvent intervenir après l’atteinte de cette limite d’âge. Le Conseil d’État ajoute néanmoins deux conditions à cette possibilité (outre les conditions classiques de la conformité à l’intérêt du service et de l’aptitude physique de l’agent) : Une limitation de prolongation au global à 10 trimestres ; L’intervention des décisions de prolongation avant toute rupture du lien de l’agent avec le service. Le Conseil d’État a finalement conclu que : « Le tribunal administratif n’a pas commis d’erreur de droit en jugeant que l’Etat était tenu de prendre en compte l’ensemble des périodes correspondantes pour la détermination des droits à pension de l’intéressé, alors même qu’une partie de ces autorisations lui avait été accordées après la survenance de sa limite d’âge ». Cette jurisprudence restera d’actualité aujourd’hui malgré l’abrogation de l’article 1-1 de la loi du 13 juillet 1984 relative à la limite d’âge dans la fonction publique et le secteur public puisque cette disposition a été codifiée à l’article L. 556-5 du code général de la fonction publique qui prévoit que : « Le fonctionnaire dont la durée des services liquidables est inférieure à celle définie à l'article L. 13 du code des pensions civiles et militaires de retraite peut, sur sa demande, lorsqu'il atteint la limite d'âge qui lui est applicable dans le corps ou le cadre d'emplois auquel il appartient, bénéficier d'une prolongation d'activité, sous réserve de l'intérêt du service et de son aptitude physique. Cette prolongation ne peut avoir pour effet de maintenir le fonctionnaire concerné en activité au-delà de la durée des services liquidables définie à l'article L. 13 du code précité ni au-delà d'une durée de dix trimestres. Elle est prise en compte au titre de la constitution et de la liquidation du droit à pension. Cette prolongation intervient, le cas échéant, après application des possibilités de recul de la limite d'âge prévues aux articles L. 556-2 et L. 556-3 ». Cette position de la Haute juridiction est aussi une preuve de pragmatisme dans l’application de la règle de la limite d’âge, évitant l’écueil, lié à la position en défense du ministre, qui aurait conduit à ce qu’un agent sollicitant sa prolongation d’activité doive anticiper, sans marge de manœuvre possible, l’intégralité de sa période de prolongation, avant de la solliciter.

  • Newsletter de février 2024

    Chaque mois, nous partageons l'actualité du droit de la fonction publique et du cabinet, à travers nos analyses ainsi que des commentaires et liens que nous avons recueillis et sélectionnés pour vous. Bonne lecture ! LIEN VERS LA NEWSLETTER

  • L’incertitude du sort des congés annuels en cas de mutation d’un agent public

    Que deviennent les congés annuels d’un agent public en cas de mutation entre deux administrations en cours d’année ? Beaucoup d’ « usages » sont évoqués, mais aucune règle juridique claire ne semble parfaitement répondre à cette question qui se pose pourtant très régulièrement dans la carrière d’un agent public. Les trois décrets relatifs aux congés annuels des agents publics (décret n° 84-972 du 26 octobre 1984 relatif aux congés annuels des fonctionnaires de l'Etat ; décret n° 85-1250 du 26 novembre 1985 relatif aux congés annuels des fonctionnaires territoriaux ; décret n° 2002-8 du 4 janvier 2002 relatif aux congés annuels des agents des établissements mentionnés à l'article 2 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière) sont parfaitement clairs sur un point : les droits à congés annuels d’un agent public sont calculés du 1er janvier au 31 décembre d’une année. Par ailleurs, lorsque l’agent n’exerce ses fonctions que durant une partie de l’année, il est également constant dans ces textes que ses droits à congés annuels sont proratisés selon sa durée de présence. Mais aucun de ces textes ne précise ce qu’il advient des congés annuels d’un agent public qui mute en cours d’année. L’agent doit-il solder les congés acquis au sein de l’administration d’origine avant sa mutation au sein de la nouvelle administration, ou bien les jours acquis sont-ils automatiquement transférés et pourront être utilisés après mutation ? I – La solution, juridiquement certaine, du compte épargne-temps (CET) Il est une solution juridiquement certaine et prévue par les textes : l’agent dont la mutation est prévue peut placer les jours de congés annuels cumulés dans son administration d’origine sur son compte épargne-temps (« CET »). Les trois décrets relatifs aux CET dans la fonction publique (décret n° 2002-634 portant création du compte épargne-temps dans la fonction publique de l'Etat et dans la magistrature ; décret n° 2004-878 du 26 août 2004 relatif au compte épargne-temps dans la fonction publique territoriale ; décret n° 2002-788 du 3 mai 2002 relatif au compte épargne-temps dans la fonction publique hospitalière) sont alors d’une clarté limpide : l’agent « conserve les droits qu’il a acquis au titre du compte épargne-temps » en cas de mutation, de changement d’établissement, de collectivité, etc… La solution simple est donc, en cas de mutation, de placer les jours acquis au titre des congés annuels sur CET afin d’en assurer juridiquement le transfert au sein de sa nouvelle administration. II – Le flou juridique des jours non placés sur CET Mais la seule mention de cette solution juridiquement certaine ne résout pas la question du sort des congés annuels qui ne seraient pas placés sur CET en cas de mutation. Étonnamment, le sujet est souvent traité dans la documentation relative à la fonction publique… Mais de manière totalement différente, et sans jamais aucune référence juridique précise. Pour ne donner que quelques exemples, le Centre départemental de gestion de la fonction publique territoriale (« CDG ») de l’Eure indique ainsi, dans sa documentation relative aux congés annuels, que « En cas de congé non pris, un fonctionnaire ne peut prétendre au versement d’une indemnité compensatrice et ce, en aucun cas. Ainsi, en cas de départ d’un agent de sa collectivité (démission, mutation, retraite), l’agent doit avoir soldé ses jours de congés annuels avant de partir. » A l’inverse, le CDG de la Dordogne, dans sa documentation relative à la mutation, précise, s’agissant des conséquences de la mutation, que « Les droits à congés annuels s'appréciant au regard des services accomplis sur une année civile, l'agent qui change de collectivité en cours d'année conserve les droits à congés de l'année en cours, qui lui seront octroyés par la collectivité d'accueil, après appréciation des nécessités de service. » Le site gouvernemental d’information juridique service-public.fr dédie une page spécifique à la question, intitulée « Que deviennent les congés annuels d'un fonctionnaire qui change d'administration ? » Mais, loin de trancher le débat, la Direction de l’information légale et administrative (éditrice du célèbre site d’information) indique, sans références juridiques, que les congés annuels pourraient être pris « indifféremment dans votre ancienne ou votre nouvelle administration », tout en précisant qu’il est « toutefois […] d’usage qu'avant de quitter son ancienne administration, un fonctionnaire y prenne tous les congés auxquels il a droit en fonction de sa durée de services dans cette administration. » Faute de précision textuelle, ni même donc d’accord doctrinal sur le sujet, l’on pourrait se tourner vers la jurisprudence. Mais il n’existe malheureusement pas, à notre connaissance, de décision de justice qui se soit expressément prononcée sur la question. Tout au plus le juge des référés du tribunal administratif de Nîmes a-t-il pu refuser une demande de paiement, en référé-provision, d’une indemnisation liée aux congés annuels non pris dans le cadre d’une mutation d’une collectivité à une autre, visant notamment le fait que l’agent aurait pu placer lesdits jours sur son CET pour se les voir transférer au sein de la nouvelle collectivité (TA Nîmes, ord., 30 janvier 2024, M. B. c/ SDIS de la Lozère, req. n° 2304195). Doit quand même être remarquée une décision du Conseil d’État qui précise que la mutation d’un agent public d’une administration à une autre constitue une situation de fin de relation de travail au sens de la directive européenne 2003/88/CE du 4 novembre 2003 qui permet l’indemnisation des droits à congés non pris du fait d’une situation de maladie (CE, 7 décembre 2015, Communauté d’agglomération de Royan-Atlantique, req. n° 374743). La Haute Assemblée avait alors permis à l’agent qui, du fait d’un congé de maladie, n’avait pu prendre les congés annuels acquis dans les années précédant sa mutation, d’obtenir indemnisation de ces derniers. Il ne nous semble pas que cette décision, prise spécifiquement dans le sens d’une interprétation de la directive européenne ouvrant droit à l’indemnisation des congés annuels non pris du fait d’une situation de maladie, puisse être étendue au point d’estimer que toute mutation constitue une fin de relation de travail coupant l’agent public des droits acquis au titre de la relation de travail qu’il vient ainsi de quitter (et donc que l’agent devrait nécessairement solder ses droits à congés avant toute mutation, à défaut de les placer sur son CET). Il reste donc un réel flou juridique, rendant impossible l’affirmation d’un quelconque droit à bénéficier d’un « transfert » des droits à congés annuels acquis en cas de mutation d’un agent public. Face à cette incertitude persistante ainsi exposée, il apparaît prudent, comme le suggèrent certains CDG (voir par exemple la documentation relative à la mutation du CDG de l’Eure-et-Loir), pour l’agent public dont la mutation approche : ·       Soit de solder ses jours de congés annuels avant la date de mutation ; ·       Soit de placer lesdits jours sur son CET ; ·       Soit d’anticiper la question et de s’assurer d’un accord écrit de reprise des jours de congés annuels par l’administration d’accueil.

  • Communiqué de presse

    Depuis le 26 janvier 2024, sept sapeurs-pompiers professionnels du Service Départemental d’Incendie et de Secours de la Loire (SDIS 42) se voient refuser le port de la barbe et font l’objet, à un rythme effréné, d’une série de mesures successives à caractère disciplinaire : avertissement, relève de fonctions, affectation temporaire en service hors rang, sanction d’exclusion temporaire de fonctions d’une journée et d’un placement en position de service non fait donnant lieu à des retenues sur leur traitement. Le cabinet Officio avocats assiste et représente ces sept agents dans leurs actions visant à faire suspendre et annuler les décisions litigieuses, devant le tribunal administratif de Lyon. Ces agents, profondément respectueux de leur devoir de réserve et convaincus de la nécessité de laisser la juridiction administrative accomplir son travail sereinement, avaient sciemment choisi de ne pas rendre publiques leurs actions. Toutefois, depuis le 15 février dernier, le secrétaire général du syndicat SUD SDIS d’un département voisin, Monsieur Rémy Chabbouh, s’exprime régulièrement sur le sujet auprès de la presse écrite et télévisuelle contre le souhait des agents concernés. Ces interventions laissent à penser que Monsieur Chabbouh et le syndicat SUD SDIS sont en contact et accompagnent ces agents dans leurs actions, ce qui n’est pas le cas. Ces interventions laissent à penser que les agents auraient engagé un référé-liberté « au nom de leur liberté fondamentale de disposer de leur apparence physique », ce qui n’est pas le cas non plus. Outre qu’elles ne font qu’inquiéter les proches de ces sept agents, chacune de ces interventions, et la révélation des informations potentiellement stratégiques et/ou erronées qu’elles contiennent, les expose davantage à de nouvelles mesures de la part du SDIS 42 en réaction, et peut fragiliser leur action en justice. Dans ces conditions, les agents concernés tenaient à se désolidariser des propos tenus par Monsieur Chabbouh et à réaffirmer qu’il ne s’exprime pas en leurs noms. L'équipe d'Officio avocats

  • Suspension d’une sanction de déplacement d’office d’un magistrat du fait de son état de santé et de celui de ses enfants

    Par un arrêt du 18 janvier 2024 req. n° 490407, le Conseil d’État vient prononcer la suspension d’une décision de sanction d’un magistrat judiciaire en raison de son état de santé et de celui d’un de ses enfants. Monsieur A.B est un magistrat judiciaire depuis 1994. Il est le père de trois enfants : l’un, aujourd’hui âgé de 17 ans, est atteint d’une maladie neurologique depuis 2008, qui s’est aggravée au fil des années, le rendant sujet à des crises pouvant être très violentes ; l’autre est sujet à des périodes de dépression sévères ayant entrainé plusieurs hospitalisations en raison de la maladie de son frère et de l’état de santé de son père. Monsieur A.B est en effet lui-même sujet à de graves dépressions qui ont entrainé plusieurs hospitalisations en 2018 et 2019 et son placement en congé de longue maladie de mai 2019 à mai 2022. En février 2018, Monsieur A.B a ouvert une enquête pénale, sans prévenir sa hiérarchie et sans avoir la charge de ce type d’infraction, pour des faits d’escroquerie et de tentative d’escroquerie commis en bande organisée au préjudice du père de l’ancienne bâtonnière du barreau de Bordeaux, qui a été pendant plusieurs années l’employeur de son épouse et qu’il connaissant de longue date. C’est dans ce contexte que le garde des Sceaux, après avoir recueilli l’avis du conseil supérieur de la magistrature, a prononcé, le 30 novembre 2023, une sanction de déplacement d’office de Monsieur A.B, en raison de manquements à ses devoirs de loyauté, d’impartialité et de probité. Il lui est également reproché d’avoir manqué à son devoir de délicatesse par certaines insuffisances professionnelles et en ne s’étant pas suffisamment investi au sein du Parquet. Monsieur A.B a donc sollicité du juge des référés du Conseil d’État, compétent en premier et dernier ressort, la suspension de cette sanction. Dans un premier temps, sur l’urgence, le Conseil d’État a fait application d’une combinaison de deux jurisprudences, l’une considérant que l’urgence peut résulter d’atteintes portées aux conditions de vie du requérant et de sa famille (voir pour une illustration : CE, Ord, 6 août 2022, Ozoux, req. n°248393), l’autre considérant que l’urgence peut résulter des menaces que l’acte attaqué est susceptible de faire peser sur la santé du requérant (voir pour une illustration : TA Marseille, Ord, 21 janvier 2002, Sow, req. n°017590 ou TA Versailles, Ord, 16 octobre 2001, S-B, Inédit). A contrario, cette jurisprudence semble aller à l’encontre de celle désormais quasi-constante visant à considérer que la condition d’urgence n’est pas remplie en matière de déplacement géographique en cas de mutation dans l’intérêt du service (voir pour illustration d’une mutation de Toulouse à Paris : CE, Ord, 27 juillet 2001, Médard, req. n°235463 ou pour un magistrat du parquet : CE, 12 septembre 2012, Courroy, req. n°361699). En l’espèce, après avoir rappelé que l’un des enfants du couple avait en 2014, bien avant la date des faits reprochés, développé une maladie neurologique le rendant sujet à des crises violentes et imposant son hospitalisation, et que Monsieur A.B avait été hospitalisé en 2018 et 2019 pour des épisodes dépressifs puis placé en congé de longue maladie de mai 2019 à mai 2022, le Conseil d’État a considéré qu’il y avait urgence à suspendre la décision prononçant le déplacement d’office de l’intéressé en raison de la grande fragilité de son état de santé et de celle de son fils de 17 ans. Cette urgence a pu être caractérisée en raison de l’attestation médicale fournie par le requérant faisant état de l’incompatibilité de son état de santé avec tout déplacement professionnel et de sa future hospitalisation prévue le 15 janvier 2024. Dans un second temps, sur le doute sérieux quant à la légalité de la décision de déplacement d’office litigieuse, après avoir rappelé une seconde fois que père et fils ont une santé fragile, notamment pendant l’année 2018, le Conseil d’État va jusqu’à considérer que cette situation familiale est susceptible d’avoir affecté l’assiduité de Monsieur A.B ainsi que sa disponibilité et son investissement au sein du Parquet. Ensuite, le Conseil d’État considère que le contexte médical et familial de Monsieur A.B a également pu justifier son manque de « clairvoyance » au moment de l’ouverture en 2018 d’une enquête pénale en guise de “fleur” offerte à une connaissance qui n’est autre que le père de la bâtonnière du barreau de Bordeaux. Dans ce contexte, les moyens tirés de manquement au devoir de probité et de disproportion de la sanction évoqués par la défense du magistrat apparaissent, pour le Conseil d’État, de nature à créer un doute sérieux sur la légalité de la sanction. Le déplacement d’office étant la seconde sanction la moins forte applicable aux magistrats, cet arrêt cantonne donc le ministère, s’il entend reprendre une sanction, au prononcé d’un blâme avec inscription au dossier (sanction la moins forte pour les magistrats). Sur le fond, s’il est appréciable que le juge des référés accueille favorablement d’autres circonstances de nature à créer une urgence à suspendre que la simple situation financière des agents publics, il est toutefois étonnant de relever que la situation familiale et l’état de santé de l’agent puissent excuser l’ensemble de ses comportements fautifs. Si le juge des référés est le juge de l’évidence selon la formule consacrée, l’illégalité de ce déplacement d’office ne semble, en l’espèce, pas aller de soi. En effet, alors que le manque d’investissement et les insuffisances professionnelles peuvent être en lien direct avec des problématiques familiales récurrentes et de santé, en revanche, il est plus difficilement concevable que ces problématiques viennent aussi expliquer le “manque de discernement” de Monsieur A.B dans le cadre de l’ouverture d’une enquête de complaisance, notamment eu égard à l’importance de ses fonctions et au discernement attendu des magistrats.

  • S’abstenir de se présenter au concours de praticien des établissements publics de santé ne peut fonder le refus de verser l’indemnité de fin de contrat

    Par un arrêt du 19 juillet 2023 (req. n° 469875), mentionné aux tables du recueil Lebon, le Conseil d’État a précisé sa jurisprudence sur le droit des praticiens hospitaliers à bénéficier de l’indemnité de fin de contrat prévue à l’article L. 1243-8 du code du travail en cas de refus d’une proposition de CDI. Dans cette affaire, M. X a été recruté par un centre hospitalier en qualité de praticien contractuel afin d'assurer des remplacements. Son contrat a été renouvelé à plusieurs reprises. À l’issue de son dernier contrat, il a sollicité notamment le bénéfice de l'indemnité de fin de contrat prévue à l'article L. 1243-8 du code du travail. Le centre hospitalier a refusé au motif qu’il s’est abstenu de présenter sa candidature au concours national de praticien des établissements publics de santé prévu à l’article R. 6152-308 du code de la santé publique. Sur le cadre juridique, l’article L. 1243-8 du code du travail prévoit que : « Lorsque, à l'issue d'un contrat de travail à durée déterminée, les relations contractuelles de travail ne se poursuivent pas par un contrat à durée indéterminée, le salarié a droit, à titre de complément de salaire, à une indemnité de fin de contrat destinée à compenser la précarité de sa situation ». Cette indemnité bénéficie au praticien hospitalier par l’article R. 6152-418 du code de la santé publique. Mais cette indemnité n’est pas octroyée « lorsque le salarié refuse d'accepter la conclusion d'un contrat de travail à durée indéterminée pour occuper le même emploi ou un emploi similaire, assorti d'une rémunération au moins équivalente » en application du 3° de l’article L. 1243-10 du code du travail. Le Conseil d’État censure pour erreur de droit la Cour administrative d'appel de Nantes qui avait jugé légal le refus du centre hospitalier pour ce motif. Dans un premier temps, le Conseil d’État rappelle sa jurisprudence (CE, 22 février 2018, req. n° 409251, T. p743-746), codifiée à l’article R. 6152-375 du code de la santé publique, jugeant que lorsqu’un établissement hospitalier, employant un praticien hospitalier contractuel, déclare vacant un emploi de praticien hospitalier relevant de la spécialité du praticien contractuel le refus de ce dernier de présenter sa candidature sur cet emploi alors qu’il a été admis au concours doit être assimilé à un refus de proposition de CDI au sens du 3° de l’article L. 1243-10 du code du travail. Dès lors, il ne peut bénéficier de l’indemnité de fin de contrat sous réserve qu'eu égard aux responsabilités et conditions de travail qu'il comporte l'emploi vacant puisse être regardé comme identique ou similaire à celui précédemment occupé en qualité de contractuel et qu'il soit assorti d'une rémunération au moins équivalente. Dans un deuxième temps, le Conseil d’État juge toutefois que le praticien hospitalier peut prétendre au bénéfice de cette indemnité dans le cas où il n’a pas été reçu au concours, soit parce qu’il ne s’est pas présenté sa candidature, soit parce qu'il a échoué au concours, et qu’il n’est pas inscrit sur la liste d’aptitude à la fonction de praticien hospitalier. Ainsi, le Conseil d’État distingue selon que le praticien hospitalier soit admis au concours et selon qu’il ne soit pas admis au concours, par non-présentation ou par échec au concours, et non inscrit sur la liste d’aptitude.

  • L’entretien professionnel annuel est une obligation… même si l’agent refuse de s’y présenter

    Les juges administratifs d’appel parisiens (Cour administrative d’appel de Paris, 25 octobre 2023, Mme A. c/ Établissement public des musées d’Orsay et de l’Orangerie, req. n° 21PA02972) sont venus rappeler l’obligation, pour l’administration, de réaliser annuellement un entretien professionnel permettant d’évaluer la valeur professionnelle des fonctionnaires, quand bien même l’agent concerné refuserait de se présenter à l’entretien auquel il est convoqué. Madame A., secrétaire administrative de classe normale du ministère de la Culture, affectée au musée d’Orsay pendant plusieurs années, a recherché la responsabilité de son employeur devant le juge administratif en raison des conditions et du déroulement de sa carrière, excipant notamment de ce qu’elle n’avait pas été évaluée pendant 7 années successives. Le tribunal administratif de Paris, bien qu’ayant estimé qu’une faute avait été commise par l’administration sur ce point, avait refusé d’indemniser l’agent pour le préjudice subi, et Madame A. a donc fait appel de ce jugement. En défense, l’administration soutenait que si les entretiens n’avaient pas eu lieu, c’est que Madame A. ne s’était jamais présentée aux convocations qui lui avait été envoyées. En droit, pour rappel, l’article L. 521-1 du code général de la fonction publique prévoit que : « l’appréciation de la valeur professionnelle d’un fonctionnaire se fonde sur une évaluation individuelle donnant lieu à compte rendu qui lui est communiqué ». Les textes réglementaires d’application des anciens articles des titres II, III et IV du statut fusionnés dans les nouvelles dispositions du CGFP (et notamment le décret n° 2010-888 du 28 juillet 2010 pour la fonction publique de l’État, le décret n° 2014-1526 du 16 décembre 2014 pour la fonction publique territoriale et le décret n° 2020-719 du 12 juin 2020 pour la fonction publique hospitalière), prévoient eux que cet entretien, mené par le supérieur hiérarchique direct de l’agent, se fait annuellement. Certes, pour pouvoir être évalué, l’agent doit avoir effectivement exercé ses fonctions sur une période suffisante durant l’année : l’agent absent durant une année entière pour congé maladie ne pourra ainsi être évalué, faute pour le supérieur hiérarchique d’avoir une appréciation à fournir sur sa valeur professionnelle (Conseil d’État, 1er août 2013, M. B. c/ Ministre de l’économie et des finances, req. n° 347327). Mais les congés maladie ne font pas, en tant que tels, obstacle à la convocation de l’agent à un entretien : la cour administrative d’appel de Paris avait déjà jugé que le fait que l’agent soit placé en congé maladie durant la période des entretiens annuels n’exonérait pas l’administration de le convoquer à un entretien (pouvant se dérouler éventuellement en visio-conférence, par exemple) (naturellement si l’agent avait, sur l’année précédente, exercé ses fonctions sur une période suffisante pour être évalué) (Cour administrative d’appel de Paris, 13 juillet 2022, M. B. c/ Ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, req. n° 20PA04065). Mais qu’en était-il du cas où, l’agent, dûment convoqué, ne se présente pas à l’entretien ? Dans l’affaire commentée, la cour administrative de Paris y répond, en rappelant que : « la circonstance, à la supposer établie, que l'intéressée aurait refusé de se présenter aux entretiens professionnels, n'est pas de nature à exonérer l'administration de cette obligation et ne faisait en tout état de cause pas obstacle à ce que son supérieur hiérarchique évalue sa manière de servir. » Censurant sur ce point le jugement du tribunal administratif de Paris (qui avait rejeté toute indemnisation), les juges d’appel ont condamné l’État à verser à l’agent 2.000 euros pour préjudice moral, ainsi que 1.000 euros pour perte de chance d’obtenir une promotion, l’absence d’évaluation durant 7 années ayant fait obstacle à l’examen du dossier de la requérante pour l’avancement. Aussi, l’entretien annuel du fonctionnaire doit obligatoirement être réalisé, que l’agent évalué, dûment convoqué, se présente à l’entretien ou non. L’absence d’entretien à proprement parler n’empêche ainsi nullement le supérieur hiérarchique de l’agent de rédiger un compte-rendu sur l’appréciation qu’il porte quant à la valeur professionnelle de ce dernier. Naturellement, cette précision de la cour administrative d’appel de Paris n’exonère pas totalement les agents de leur présence à de tels entretiens : ceux-ci s’exposent bien entendu, en cas de refus non justifié, à des sanctions disciplinaires. Mais cet arrêt permet de rappeler toute l’importance que revêt l’entretien professionnel dans la carrière d’un agent public, et ainsi l’impossibilité – quasi-totale – pour l’administration de faire abstraction d’une réelle obligation de procéder, à échéance annuelle, à l’évaluation de la valeur professionnelle de ses agents.

  • Annulation d’un tableau d’avancement dressé par ordre alphabétique et non par ordre de mérite

    Par un arrêt du 21 septembre 2023 (req. n° 464800), le Conseil d’État rappelle quelques précisions dans le cadre d’un contentieux relatif au tableau d’avancement. Dans cette affaire, un agent intégré dans le corps des conservateurs du patrimoine est passé conservateur en chef en 2009. Toutefois, par la suite, il n’a pas été promu au dernier grade de conservateur général. Mécontent de cette situation, il demande l’annulation du décret du Président de la République du 7 janvier 2022 portant nomination et titularisation dans le grade de conservateur général du patrimoine au titre de l’année 2022 d’annuler, au motif qu’il n’y figure pas. Dans un premier temps, le Conseil d’État rappelle que l'établissement du tableau d'avancement, qui constitue un acte collectif composé de plusieurs décisions à caractère individuel (CE, 21 mars 2001, Syndicat de lutte pénitentiaire de l’union régionale Antille-Guyane, n° 231087, A), et les mesures individuelles de promotion du décret attaqué constituent une opération complexe. Il y a opération complexe « lorsqu’une décision finale ne peut être prise qu’après intervention d’une ou plusieurs décisions successives, spécialement prévues pour permettre la réalisation de l’opération dont la décision finale sera l’aboutissement » (René Chapus, Droit du contentieux administratif, 13ème éd., 2008, Montchrestien, n°781, p. 692 et 693.) Cette opération complexe permet de contester le tableau d’avancement quand bien même il aurait acquis le caractère définitif. En effet, la théorie de l’opération complexe est le fondement d’une exception à la règle selon laquelle il n’est plus possible d’exciper de l’illégalité d’un acte non réglementaire une fois qu’il est devenu définitif. Ainsi, il est possible de contester le tableau d’avancement par la contestation des nominations qui en procèdent. Le Conseil d’État reprend ainsi une décision antérieure identique de 2015 (CE, 27 mai 2015, n° 370149). En l’espèce le requérant était recevable à contester le tableau d’avancement alors même qu’il n’a pas attaqué dans le délai de recours contentieux le tableau d’avancement. Dans un deuxième temps, le Conseil d’État rappelle qu’un tableau d'avancement doit être établi par ordre des mérites et non par ordre alphabétique, comme le prescrit en l’espèce l’article 58 de la loi du 11 janvier 1984 statutaires relatives à la fonction publique de l’État, alors applicable (dorénavant art. L. 522-18 du CGFP), lequel prévoit que l'avancement de grade a notamment lieu « au choix, par voie d'inscription à un tableau annuel d'avancement, établi par appréciation de la valeur professionnelle et des acquis de l'expérience professionnelle des agents » et « les promotions doivent avoir lieu dans l'ordre du tableau ». Il ajoute également que l'article 13 du décret du 28 juillet 2010 relatif aux conditions générales de l'appréciation de la valeur professionnelle des fonctionnaires de l'État dispose que : « Les fonctionnaires sont inscrits au tableau par ordre de mérite. Les candidats dont le mérite est jugé égal sont départagés par l'ancienneté dans le grade ». Ainsi, puisque les textes applicables ne prévoient pas de dérogation, il ne pouvait en aller autrement. Il s’ensuit que cette illégalité entraine l’annulation du décret et il est enjoint au ministre de reprendre les opérations de nomination dans le grade de conservateur général du patrimoine au titre de l'année 2022. A titre de précision, le Conseil d’État n’a pas suivi son rapporteur public qui a conclu au rejet de la requête. Il a, notamment, conclu que si le moyen était fondé en ce que la ministre avait dressé à tort le tableau d’avancement par ordre alphabétique pour autant il était inopérant car cela n’avait pas d’incidence que le classement dans le tableau soit dressé par ordre alphabétique ou par mérite puisque le requérant n’y figurait pas.

  • L'absence d'obligation d'informer son futur employeur public de sa qualité de fonctionnaire

    Par un arrêt du 16 novembre 2023 (n° 20NC03776), la Cour administrative d'appel de Nancy est revenue sur la notion de fraude et sur l'absence d'obligation d'un candidat à un emploi contractuel d’informer son futur employeur public de sa qualité de fonctionnaire. Dans cette affaire, une fonctionnaire territoriale titulaire du grade de rédacteur en chef avait été recrutée en 2016 par une commune sur un contrat à durée déterminée pour assurer les fonctions de responsable du service financier de la ville. Le 1er février 2019, son contrat a été renouvelé pour une durée de trois ans. Toutefois, le 29 mai 2019, la commune, apprenant que l’agente avait omis de les informer de sa qualité de fonctionnaire, a décidé de retirer son contrat et de mettre fin à ses fonctions. Pour justifier le retrait de ce contrat, la commune se fondait sur les dispositions de l’article L. 242-1 du code des relations entre le public et l’administration, qui offrent la possibilité à l’administration de retirer ou d’abroger à tout moment un acte administratif obtenu par fraude. La cour devait donc répondre à la question suivante : l’agente avait-elle commis une fraude fondée sur un manquement à une obligation d’information sur sa qualité de fonctionnaire, susceptible de justifier le retrait de son contrat à durée déterminée ? A cet égard, comme l’explique le rapporteur public Monsieur Stéphane HONYNCK, dans ses conclusions sous la décision rendu par le Conseil d’État le 30 décembre 2021 (req. n° 441863, précitée) : « la fraude implique la réunion d’un élément objectif, tenant à ce que la demande adressée à l’administration ne correspond pas à la réalité et un élément subjectif tenant à la volonté de l’intéressé d’induire en erreur l’administration ». Aussi, et en premier lieu, les juges d’appel ont rappelé que, de manière générale, lorsqu’un fonctionnaire n’a pas l’obligation d’informer de certains éléments la collectivité publique auprès de laquelle il postule, il ne peut être regardé comme ayant commis une fraude en n’en faisant pas état. Sur ce point, et à titre d’exemple, le Conseil d’État a déjà eu l’occasion de juger qu’un fonctionnaire n’a pas l’obligation d’informer la collectivité publique auprès de laquelle il postule dans le cadre d’une procédure de mutation de l’existence d’une enquête pénale le mettant en cause (CE, 30 décembre 2021, Mme C c/ commune de Linas, req. n° 441863). Dans l’arrêt commenté en l’espèce, la cour administrative d’appel de Nancy a également précisé qu’un candidat n’avait aucune obligation « d’informer son futur employeur public de son statut de fonctionnaire lors de sa candidature à un emploi contractuel », dès lors qu’une telle obligation ne résulte d’aucune disposition législative ou réglementaire. En second lieu, l’arrêt relève qu’en l’espèce, il existait des « incertitudes » sur la situation administrative et statutaire de l’agente. Plus précisément, ces doutes pouvaient s’expliquer eu égard à la circonstance qu’elle n’était plus affectée sur aucun poste depuis plusieurs années et qu’en outre, les nombreux contentieux engagés par celle-ci contre d’autres collectivités publiques ont donné lieu à des décisions divergentes sur son statut. Aussi, il semblerait que les juges d’appel se soient attachés à apprécier si l’un des éléments constitutifs de la fraude était réuni, en l’espèce, l’élément intentionnel. Ici, non seulement l’agente n’avait aucune obligation de dévoiler son statut de fonctionnaire à son futur employeur mais elle n’a, en outre, pas volontairement trompé ce dernier.Aucune fraude ne pouvait donc être caractérisée. En conséquence, la cour a jugé que la décision par laquelle la commune a retiré le contrat à durée déterminée de l’intéressée et l’a radiée des effectifs était illégale et devait être annulée.

  • Révoquée régulièrement… sans avis du conseil de discipline !

    Par un arrêt du 28 août 2023 (n° 22PA03737), la Cour administrative d’appel de Paris a marqué son attachement à la protection de l’image et du pouvoir disciplinaire des élus locaux, au détriment des garanties disciplinaires. Les élections législatives de juin 2020 ont passablement irrité Mme B, à tel point qu’elle décida de publier sur un réseau social de renom des propos outrageants et insultants à l’égard de son employeur, le Maire d’une petite commune de Seine-et-Marne. Dans cette affaire, Madame B, agente de la commune de Montereau-Fault-Yonne, passablement irritée par les élections municipales, a publié sur Facebook des propos outrageants et dénigrants à l’égard du Maire de sa collectivité. Ce dernier est taxé entre autres, d’égocentrique, narcissique et jugé être inapte à gérer les affaires de la commune. Il n’en faudra pas plus au Maire pour engager une procédure disciplinaire à l’encontre de Madame B. Il lui est reproché d’avoir manqué à son devoir de réserve en publiant de tels propos à l’égard de son employeur sur Facebook. Il lui est également reproché d’avoir manqué à son devoir d’obéissance hiérarchique, Madame B refusant de rendre un ordinateur professionnel qu’elle conservait précieusement chez elle. Parallèlement à cela, Madame B a demandé sa mutation au sein d’une autre collectivité. Cette demande n’avait reçu aucune opposition de la part de la collectivité d’origine de sorte que sa mutation devait être effective au 2 octobre 2020. Toutefois, à l’occasion de la séance du conseil de discipline du 18 septembre 2020, qui devait se pencher sur le cas de Madame B, il a été fait droit à sa demande de renvoi. La nouvelle séance devait se réunir le 18 décembre 2020, plus de deux mois après la date de prise d’effet de sa mutation. Dès lors, à compter du 1er octobre 2020 à minuit, le maire de la commune de Montereau-Fault-Yonne devenait incompétent pour édicter un arrêté de sanction à l’encontre de Madame B. En l’espèce, après avoir fait droit à la demande de renvoi de Mme B le 18 septembre, le Maire mit en demeure le conseil de discipline, saisi initialement le 27 juillet 2020, de se réunir avant le 24 septembre 2020, mais ce dernier refusa de se réunir dans un délai aussi rapproché. Le Maire s’empressa alors de convoquer l’agente a un entretien dont la date était fixée au lendemain, le 25 septembre, avant de la révoquer le 28 septembre suivant. Ce faisant, le Maire a fait application de la théorie jurisprudentielle des « formalités impossibles », dont l’une des applications en matière disciplinaire a permis au Conseil d’État d’arrêter la position suivante : « Considérant que si le délai de deux mois imparti au conseil pour donner son avis n'est pas prescrit à peine de nullité, la carence de ce conseil ne saurait avoir pour effet de priver le maire du pouvoir d'exercer ses attributions en matière disciplinaire ; qu'il appartient dans ce cas au maire de mettre le conseil disciplinaire en demeure de se prononcer dans un délai déterminé ; que c'est seulement s'il n'est pas fait droit à cette demande et sauf impossibilité matérielle pour le conseil de se réunir, que le maire est en droit de passer outre à la carence du conseil et de prononcer la sanction sans avis de ce conseil, après avoir invité le fonctionnaire à présenter sa défense » (CE, 29 juillet 1994, n°135096 139933). Cette situation ne doit cependant pas avoir pour effet de priver le fonctionnaire des garanties offertes par la procédure disciplinaire et notamment du délai de 15 jours entre la convocation et la réunion du conseil de discipline qui permet au fonctionnaire de préparer sa défense. La seule disposition législative comparable à cet attendu de principe se retrouve à l’article R. 4137-53 du code de la Défense et concerne les militaires poursuivis devant le conseil de discipline. Compte tenu du délai particulièrement bref ayant été accordé à Madame B pour préparer sa défense, le Tribunal administratif de Melun a estimé que la requérante n’avait pas bénéficié d’un délai suffisant pour préparer sa défense et a ainsi été privée des garanties offertes par la procédure disciplinaire. Cela ne fut cependant pas l’avis de la Cour administrative d’appel de Paris, plus attachée à l’idée de ne pas priver le Maire de son pouvoir disciplinaire que d’être la garante des minimas procéduraux offerts aux fonctionnaires dans le cadre de la procédure disciplinaire. La Cour a ainsi relevé que : « (…) l'intimée a été informée de la saisine du conseil de discipline dès le 27 juillet 2020, qu'elle a ainsi pu utilement consulter son dossier le 4 août 2020, réunir plusieurs témoignages, constituer un avocat pour sa défense, et produire un mémoire dans les délais impartis. En outre, elle a été informée le 17 août 2020 de la date de la réunion du conseil de discipline prévue le 18 septembre suivant ». Elle précise ensuite que « Par suite, si le délai séparant la convocation de Mme B ... de l'entretien avec le maire de la commune de Montereau-Fault-Yonne n'a pas répondu aux conditions de forme prévues par l'article 19 du décret du 18 septembre 1989 visé ci-dessus, relatif à la procédure disciplinaire applicable aux fonctionnaires territoriaux, le maire de la commune de Montereau-Fault-Yonne ne peut être regardé, dans les circonstances particulières de l'espèce, eu égard aux garanties dont l'intéressée avait bénéficié depuis l'engagement de la procédure disciplinaire, mentionnées ci-dessus, et à l'impossibilité, pour la commune, d'exercer son pouvoir de sanction à raison de la prise d'effet de la mutation de l'intéressée à la demande de cette dernière, comme l'ayant privée des garanties auxquelles lui ouvrait droit l'engagement de la procédure disciplinaire ». La Cour a donc annulé le jugement du tribunal administratif de Melun en considérant que, bien que n’ayant eu qu’une journée entre sa convocation et l’entretien devant le Maire, et alors même qu’elle ne verrait jamais le conseil de discipline, Madame B n’a pas été privée des garanties offertes par la procédure disciplinaire et la sanction de révocation est proportionnée aux manquements au devoir de réserve et d’obéissance hiérarchique. Cette décision est discutable dans la mesure où l’agente n’a pas bénéficié du délai de 15 jours prévu par l’article 6 du décret du 18 septembre 1989 qui constitue pour tout fonctionnaire poursuivi disciplinairement une garantie procédurale importante. La solution paraît d’autant plus sévère voire cynique que la révocation intervient 7 jours avant la prise d’effet d’une mutation que le même Maire avait pourtant acceptée, et ce postérieurement à l’ouverture de la procédure disciplinaire.

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  • L'exclusion temporaire de fonctions de l'agent en congé de maladie : la fin de la règle du report

    Par un arrêt du 3 juillet 2023 (M. A. c/ Ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse, req. n° 459472), le Conseil d'État a mis fin à une règle jurisprudentielle incertaine qui visait à imposer le report des effets d'une exclusion temporaire de fonctions d'un agent en congé maladie : dorénavant, le fait que l'agent soit en congé maladie n'empêche plus l'entrée en vigueur immédiate de la sanction, y compris s'agissant de ses conséquences financières (absence de rémunération). Congés de maladie et discipline : deux procédures distinctes Depuis longtemps, le Conseil d'État rappelle que le fait qu'un agent soit en congé maladie n'empêche pas l'engagement d'une procédure disciplinaire à son encontre, ni, en principe, qu'une sanction soit prise contre l'agent (CE, 11 mars 1992, Mme L. c/ CHR de Bordeaux, req. n° 88306). Il n'existe en effet, et assez logiquement, aucune difficulté à ce qu'un agent placé en congé de maladie soit l'objet d'une sanction telle qu'un avertissement, un blâme, un abaissement d'échelon ou encore une rétrogradation. Plus délicate pouvait apparaître le prononcé d'une sanction visant à exclure l'agent du service, telle une exclusion temporaire de fonctions ou une révocation, dès lors, qu'au-delà de la simple modification de la situation administrative "de carrière" de l'agent, l'exclusion du service entraîne une privation de rémunération, voire de droits, qui pouvait sembler entrer en conflit avec les droits ouverts à l'agent malade. S'agissant de la révocation, la jurisprudence est depuis longtemps claire : le Conseil d'État affirmait dès 1992, et confirmait encore en 2016, que le fait que l'agent soit placé en congé de maladie n'empêche pas l'entrée en vigueur immédiate d'une mesure de révocation (CE, 11 mars 1992, Mme L. c/ CHR de Bordeaux, req. n° 88306, précité ; CE, 6 juillet 2016, Mme A. c/ Garde des sceaux, ministre de la justice, req. n° 392728). L'agent n'a alors pas droit au maintien de sa rémunération, ses droits à congés maladie lui étant retirés du fait de la mesure de radiation des cadres que sous-tend la révocation (CE, 30 juillet 1997, M. X. c/ Commune de Saint-Bonnet-de-Mure, req. n° 132480). Ce constat reste toutefois une possibilité et non une règle : l'administration peut tout à fait légalement décider de prévoir qu'une mesure de révocation prendra effet uniquement à l'expiration du congé de maladie en cours de l'agent sanctionné - en raison de l'indépendance des procédures disciplinaires et de placement en congé de maladie (CE, 13 mai 1992, M. Y. c/ Ministre de la défense, req. n° 106098). Maladie et exclusion temporaire de fonctions : une approche juridique jusqu'alors tumultueuse Mais la position de la jurisprudence était jusqu'alors différente, quoi qu'incertaine, s'agissant de l'exclusion temporaire de fonctions. Différente, car par deux arrêts, rendus en 2016 et 2020 (sur la même affaire), régulièrement cités en référence et appliqués à ce titre, la cour administrative d'appel de Marseille avait estimé que du fait des droits à congé maladie de l'agent et des droits à rémunération s'y attachant, l'administration prenant une exclusion temporaire de fonctions devait nécessairement différer la prise d'effet de la sanction à l'expiration des droits à congé maladie (CAA Marseille, 24 juin 2016, Commune de Saint-Bauzille-de-Putois, req. n° 15MA02818 ; CAA Marseille, 15 octobre 2020, Commune de Saint-Bauzille-de-Putois, req. n° 19MA04416). Incertaine, car la cour administrative d'appel de Marseille, dans son arrêt de 2016, avait posé un principe général, au-delà de la seule sanction d'exclusion temporaire de fonctions, venant contredire les décisions jusqu'alors prises par le Conseil d'État sur la révocation. Elle y indiquait en effet que « le placement d'un fonctionnaire en congé de maladie le fait bénéficier du régime de rémunération attaché à cette situation et fait donc obstacle à ce qu'il exécute pendant son congé de maladie une sanction disciplinaire prononcée à son encontre  ». Ce positionnement principiel laissait ainsi à entendre que le congé maladie et ses droits à rémunération empêchaient l'exécution de toute forme de sanction s'accompagnant d'un retrait de rémunération (et donc, potentiellement également, d'une révocation, au contraire de ce qu'avait déjà pu acter le Conseil d'État jusqu'alors). Le Conseil d'État pourtant, saisi d'un pourvoi contre l'arrêt de 2016, l'avait cassé et renvoyé à la cour, mais sur un motif tout autre, laissant planer un doute sur le principe général alors dégagé par les juges marseillais (CE, 26 septembre 2019, Commune de Saint-Bauzille-de-Putois, req. n° 402496). Il n'existait pas ainsi de position tranchée de la juridiction administrative suprême sur le sujet. C'est chose faite depuis l'arrêt du Conseil d'État du 3 juillet 2023. Une nouvelle position de principe : le congé maladie n'empêche l'exécution immédiate d'aucune sanction disciplinaire Par son arrêt du 3 juillet 2023, le Conseil d'État clarifie l'errance jurisprudentielle permise par les arrêts de la cour administrative d'appel de Marseille par la prise d'une position de principe. D'une part, les juges du Palais Royal indiquent de manière dorénavant générale, tout sanction confondue, que : « la procédure disciplinaire et la procédure de mise en congé de maladie sont des procédures distinctes et indépendantes, et la circonstance qu'un agent soit placé en congé de maladie ne fait pas obstacle à l'exercice de l'action disciplinaire à son égard ni, le cas échéant, à l'entrée en vigueur d'une décision de sanction. » Les décisions de sanction disciplinaire peuvent donc dorénavant, quelles qu'elles soient, entrer en vigueur (c'est-à-dire prendre leurs effets) malgré le fait que l'agent objet de la sanction soit placé en congé maladie : il n'est plus question d'obliger le report d'entrée en vigueur d'une sanction disciplinaire (dont les exclusions temporaires de fonction) du fait d'un congé maladie. Et le Conseil d'État en précise immédiatement, de manière très didactique, les conséquences s'agissant particulièrement de l'exclusion temporaire de fonctions. La Haute Assemblée rappelle en effet que les règles « selon lesquelles le fonctionnaire conserve, selon la durée du congé [maladie], l'intégralité ou la moitié de son traitement, ont pour seul objet de compenser la perte de rémunération due à la maladie en apportant une dérogation au principe [...] subordonnant le droit au traitement au service fait. Elles ne peuvent avoir pour effet d'accorder à un fonctionnaire bénéficiant d'un congé de maladie des droits à rémunération supérieurs à ceux qu'il aurait eus s'il n'en avait pas bénéficié. » Or, l'agent objet d'une exclusion temporaire de fonctions étant par essence privé de rémunération durant l'exclusion, « il ne saurait, pendant cette période, bénéficier d'un maintien de sa rémunération à raison de son placement en congé de maladie. » Aussi, le congé maladie ne permet plus à l'agent public d'échapper à la mise en œuvre d'une sanction disciplinaire d'exclusion temporaire de fonctions, que ce soit s'agissant de la date d'entrée en vigueur de la sanction, que des conséquences financières de cette dernière. Cette position salutaire vient mettre fin à une insécurité, tant pour les agents que pour les administrations, dans l'application de ces sanctions dans le temps, et poser de manière générale une distinction franche entre les questions de congé maladie et les sanctions disciplinaires. Il convient toutefois immédiatement de rappeler que ce principe ne s'étend pas aux mesures de suspension conservatoire des articles L. 531-1 et suivants du code général de la fonction publique (anciennement article 30 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983) : ces mesures, parties intégrantes des procédures disciplinaires, ne constituent pas pour autant des sanctions disciplinaires à proprement parler, sanctions qui sont les seules visées par la décision du Conseil d'État. Le raisonnement de la décision du 3 juillet 2023 est en effet centré tant sur la notion de sanction que sur les conséquences de cette dernière sur l'agent en termes de rémunération, le Conseil d’État y opposant le droit dérogatoire au maintien de rémunération prévu pour les congés maladie et l'absence de rémunération liée à l'exclusion disciplinaire. Mais les mesures de suspension conservatoire s'accompagnent, elles, d'un maintien de rémunération (art. L. 531-1 CGFP). Dès lors qu'elles ont par ailleurs pour objet d'écarter temporairement un agent du service, et que l'agent en congé maladie est, par essence, absent du service, il nous semble que la jurisprudence qui prévoit qu'il est mis fin, en cas de congé maladie, à une mesure de suspension conservatoire (CE, 26 juillet 2011, M. T. c/ Ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales, req. n° 343837), va continuer d'exister indépendamment de ce nouveau principe relatif aux sanctions disciplinaires à part entière.

  • Le congé de maladie lié à la grossesse à l'aune du principe de non discrimination

    Par un arrêt du 7 juin 2023 (req. n° 460540), le Conseil d’État a exposé que la réduction de la prime de service pour les personnes placées en congé de maladie ordinaire, sans tenir compte de l'éventuel lien avec l’état de grossesse, n’est pas constitutive d’une discrimination. Dans cette affaire, la requérante, Mme B, agente d’un centre hospitalier, qui avait été placée en congé de maladie ordinaire durant sa grossesse en raison d’une pathologie liée à celle-ci, n’a pas bénéficié du maintien du montant intégral de sa prime de service pendant cette période. A ce titre, l’arrêté interministériel du 24 mars 1967 relatif aux conditions d'attribution de primes de service aux personnels de certains établissements énumérés à l'article 2 de la loi du 9 janvier 1986 prévoit, pour les personnels de certains établissements d’hospitalisation, de soins ou de cure publics, le versement des primes de service liées à l’accroissement de la productivité de leur travail. L’article 3 de cet arrêté précise toutefois que toute journée d’absence entraîne un abattement du montant de la prime de service (équivalant à 1/140e de son montant total). Par exception, dans le cas d’absences résultant de certains congés limitativement énumérés, le versement du montant intégral de la prime est maintenu. Parmi ces congés, figure le congé de maternité – à l’exception du congé de maladie ordinaire. Or, dans le cas spécifique d’une agente placée en congé de maladie ordinaire en raison d’un état pathologique lié à sa grossesse, cette réduction doit-elle également s’appliquer ? Pour la requérante, si une telle interprétation devait prévaloir, l’arrêté, en tant qu’il réserve un traitement identique aux personnes placées en congé de maladie ordinaire, sans distinction en fonction de l’état de grossesse, méconnaîtrait le principe de non-discrimination au regard du droit communautaire, et notamment de la directive européenne du 5 juillet 2006 relative à la mise en œuvre du principe de l’égalité des chances et de l’égalité de traitement entre hommes et femmes en matière d’emploi et de travail (transposée en droit interne par une loi du 27 mai 2008). Le Conseil d’État, saisi d’un pourvoi en cassation, a commencé par préciser que les dispositions de l’article 3 de l’arrêté de 1967 doivent être interprétées comme excluant bien le maintien de la prime de service durant les périodes d’absence pour congé de maladie lié à la grossesse. Néanmoins, pour le Conseil d’État, de telles dispositions ne méconnaissent pas le principe d’interdiction de discrimination fondée sur le sexe ou en raison de la grossesse ou de la maternité, dès lors que la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) s’est déjà prononcée sur cette question dans son arrêt C-191/03 du 8 septembre 2005 North Western Health Board c/ Margaret MacKenna : « ne constituent pas des discriminations fondées sur le sexe : une règle d’un régime de congé maladie qui prévoit, à l’égard des travailleurs féminins absents antérieurement à un congé de maternité en raison d’une maladie liée à leur état de grossesse, comme à l’égard des travailleurs masculins absents par suite de toute autre maladie, une réduction de la rémunération, lorsque l’absence excède une certaine durée. ». Sur ce sujet, la CJUE reconnaît également que les états pathologiques trouvant leur origine dans la grossesse ou dans l’accouchement relèvent du régime général applicable au cas de maladie (Arrêt du 8 novembre 1990, Handels- og Kontorfunktionaerernes Forbund, dit « Hertz », C-179/88, Rec. p. I-3979) et, qu’ainsi, un état pathologique lié à la grossesse ou à l’accouchement, apparu après le congé de maternité, peut entraîner une réduction de la rémunération dans les mêmes conditions qu’une autre maladie. Le Conseil d’État a alors jugé que l’article 3 de l’arrêté du 24 mars 1967, qui prévoit que cette prime est affectée d'un abattement pour toute journée d'absence et fait exception à cette règle pour le congé de maternité, mais non pour le congé de maladie, même s'il est lié à la grossesse, n'introduit pas une discrimination entre, d'un côté, les femmes enceintes, et, de l'autre, les hommes ou les femmes qui ne sont pas enceintes, ni aucune discrimination directe ou indirecte en raison de la grossesse ou de la maternité.

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