Pour rappel, il est précisé à l’article 6 du Code civil qu’ « on ne peut déroger, par des conventions particulières, aux lois qui intéressent l’ordre public et les bonnes mœurs ». Or, la Cour administrative d’appel de Nancy devait se prononcer sur la question de savoir si les dispositions d’admission à la retraite pour invalidité sont au nombre des dispositions protectrices d’ordre public instituées en faveur des agents sur lesquelles ces derniers ne peuvent renoncer (CAA Nancy, 23 mai 2017, Centre hospitalier de Sedan, req. n° 15NC01590).
En l’espèce, M… X, maître-ouvrier exerçant ses fonctions dans les services du Centre hospitalier de Sedan, a été admis, par décision en date du 30 mai 2013, à faire valoir ses droits à la retraite pour invalidité non imputable au service. Or, l’intéressé avait contesté ladite décision devant le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne.
Par la suite, le 6 novembre 2014, l’intéressé et son employeur public avait conclu un protocole d’accord transactionnel en vertu duquel l’établissement s’est engagé à verser une indemnité de 35 000 €, en contrepartie de la renonciation de M… X à toute réclamation pécuniaire à l’égard de l’administration. L’article 3 dudit protocole prévoyant que, « les parties se déclarent entièrement remplies de leur droit et s'engagent à se désister, en tant que de besoin et à renoncer expressément à toutes instances et actions passées, présentes ou à venir et qui trouveraient leur fondement dans la formation, l'exécution ou la rupture des relations de travail ayant existé entre elles ». Ainsi, le Centre hospitalier de Sedan soutenait que la transaction intervenue entre les parties a eu pour effet de priver d’objet la demande de M… X, et invoque dès lors un non-lieu à statuer, dès lors que le Tribunal administratif n’avait pas encore statué.
Or, les juges de première instance n’ont pas fait droit à ce moyen. La Cour d’appel confirme d’ailleurs cette position, considérant que « les agents publics ne peuvent renoncer par avance aux dispositions protectrices d'ordre public instituées en leur faveur, telles que les dispositions régissant l'admission à la retraite pour invalidité ». En l’espèce, l’agent ne peut donc renoncer à exercer un tel recours pour excès de pouvoir, solution guidée par la jurisprudence du Conseil d’Etat en la matière (CE, ass., 19 novembre 1955, Andréani, Lebon 511 ; CE, 2 février 1996, Société Etablissement Crocquet n° 152406).
Toutefois, bien qu’utile la Cour relevait en l’espèce que, « aucune transaction conclue entre M. B...et le centre hospitalier ne saurait faire obstacle à ce que l'intéressé forme un recours pour excès de pouvoir contre la décision prononçant son admission à la retraite ; que par ailleurs et en tout état de cause, eu égard aux concessions réciproques des parties qui ont un objet exclusivement pécuniaire, il ne ressort pas du protocole transactionnel, et notamment des stipulations précitées de son article 3, que M. B...aurait entendu renoncer à la possibilité de contester, par la voie d'un recours pour excès de pouvoir, toute décision administrative mettant fin à ses fonctions au sein de l'administration ».
Rappelons également qu’« il n’est pas possible à l’administration, sauf exception prévue expressément par la loi, de s’engager par un contrat ayant force obligatoire à exercer d’une façon particulière les prérogatives que la loi lui confère dans l’intérêt général » (Conclusions M. Le Chatelier sur avis d’assemblée du Conseil d’Etat, 6 décembre 2002, Syndicat intercommunal des établissements du second degré du district de l’Haÿ-les-Roses, req. n° 249153). Ainsi, l’administration ne peut ni s’engager « par la voie d’un contrat à faire usage, dans un sens déterminée, du pouvoir réglementaire » (CE, 9 juillet 2015, Football ), ni déroger aux dispositions statutaires applicables (CE,1er octobre 2001, Cne des Angles, Rec. , p.793 ; CE, 14 juin 2004, M. Leplatre, req. n° 250695).
En définitive, la sphère de ce qui est négociable est fortement réduite pour les parties. Le principe même de la transaction tend à se limiter au terrain financier du plein contentieux à la condition que les parties puissent être en mesure d’invoquer des concessions réciproques (CE, 9 décembre 2016, Société Foncière Europe, req. n° 391840).